Mon cher frère, il ne s’agit pas aujourd’hui d’affaires temporelles. Je vous confie que Mme la duchesse d’Enville a emporté une demi-douzaine d’exemplaires des Œuvres pies[1]. Une autre personne en emporte une demi-douzaine ; le nombre des fidèles s’augmente prodigieusement ; il nous faut surtout de saintes femmes. Vous devez avoir quelques exemplaires dont vous n’aurez pas encore disposé ; je vous demande en grâce d’envoyer ceux-ci par la petite poste, mais surtout sans les contre-signer. Envoyez-en des vôtres à Mlle Clairon ; il est juste qu’elle possède les anathèmes lancés contre ceux qui l’anathématisent. Mon cher frère, je compte sur votre zèle : je m’imagine que frère Platon a été bien content du Caloyer ; ce Caloyer fait beaucoup d’effet, et j’en bénis Dieu. Écr. l’inf…
P. S. Mandez-moi, je vous prie, si vous avez reçu ce paquet, et si vous en avez fait l’usage que je vous supplie d’en faire. Dieu vous ait en aide, mon très-cher frère !
Dicunt, mon cher frère, qu’on a imprimé à Paris un catéchisme qu’on appelle, je crois, le Caloyer. Je ne suis guère curieux de voir ces drogues-là ; je suis assez occupé de mon procès. Vous devez avoir reçu, par M. d’Argental, un gros paquet que j’ai pris la liberté de vous envoyer ; vous voyez à quel point j’abuse de votre bonté.
Il vient dans ce moment chez moi un homme qui dit avoir vu ce Caloyer ; il dit que cela doit faire un très-grand effet. Tant mieux si l’ouvrage inspire la vertu, et la haine de la superstition.
La même personne m’assure qu’il paraît quelquefois des écrits dans ce goût, qu’on a la mauvaise foi de m’attribuer ; j’espère qu’au moins mes amis me rendront justice. Orate, fratres, et vigilate.
Je vous embrasse bien tendrement. Écr. l’inf…
- ↑ Le Catéchisme de l’honnête Homme ; voyez tome XXIV, page 523.