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4653. — À M.  COLINI.
Ferney, 25 auguste.

Mes yeux me refusent encore le service. Je vous envoie, mon cher Florentin, une lettre pour monseigneur l’électeur que je n’ai pu écrire moi-même[1]. Nous n’avons pas encore commencé notre Corneille ; il n’y a que moi de prêt. S’il restait encore quelque argent aux Français pour faire des souscriptions, ils devraient en faire pour reprendre Pondichéry ; mais il est plus aisé d’imprimer Corneille que d’avoir des flottes. Nous voilà à peu près comme les Italiens, nous n’avons que la gloire des beaux-arts, et encore ne l’avons-nous guère. Adieu ; je voudrais bien vous revoir avant de mourir, et je l’espère encore.


4654. — À M.  JEAN SCHOUVALOW.
Ferney 26 auguste.

Monsieur, ce sera pour moi un honneur infini, un grand encouragement pour les arts, que vous protégez, et pour la jeune héritière du nom de Corneille, qu’on puisse voir à la tête des souscriptions le nom de votre auguste souveraine, et le vôtre. Je crois vous avoir déjà mandé que le roi de France souscrit pour la valeur de deux cents exemplaires, et plusieurs princes à proportion. Je me fais une joie extrême de voir cette entreprise honorable secondée par le Mécène de la Russie.

Ce travail ne m’empêchera pas d’amasser toujours des matériaux pour votre monument. Je ne rebuterai rien, dans l’espérance de trouver quelque chose d’utile dans le fatras des plus grandes inutilités. Je suis trompé quelquefois dans mon calcul : j’acquiers qulquefois de gros paquets de manuscrits où je ne trouve rien du tout, d’autres qui ne sont remplis que de satires et d’anecdotes scandaleuses que je ne manque pas de jeter au feu, de peur qu’après moi quelque libraire n’en fasse usage. Heureusement toutes ces satires n’étaient que manuscrites ; et s’il en est quelques-unes qui aient échappé à mes recherches, elles ne feront pas fortune.

Ma santé ne me permet presque plus de sortir de chez moi : la consolation de mes dernières années sera uniquement de tra-

  1. Cette lettre manque. (B.)