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4525. — À CHARLES-THÉODORE[1],
électeur palatin.
À Ferney, le 14 avril.

Que je suis touché ! que j’aspire
À voir briller cet heureux jour,
Ce jour si cher à votre cour,
À vos États, à tout l’empire !

Que j’aurais de plaisir à dire,
En voyant combler votre espoir :
J’ai vu l’enfant que je désire,
Et mes yeux n’ont plus rien à voir !

Je ressemble au vieux Siméon[2],
Chacun de nous a son messie ;
J’ai pour vous plus de passion
Que pour Joseph et pour Marie.


Monseigneur, que Votre Altesse électorale me pardonne mon petit enthousiasme un peu profane, la joie le rend excusable. Je ne sais ce que je fais, ma lettre manque à l’étiquette. Du temps de la naissance du duc de Bourgogne, tous les polissons se mirent à danser dans la chambre de Louis XIV. Je serais un grand polisson dans Schwetzingen si je pouvais, dans le mois de juillet, être assez heureux pour me mettre aux pieds du père, de la mère, et de l’enfant. Un fils et la paix, voilà ce que mon cœur souhaite à Vos Altesses électorales ; et un fils sans la paix est encore une bien bonne aventure. Je me mets à vos genoux, monseigneur ; je les embrasse de joie. Agréez, vous et madame l’électrice, ma mauvaise prose, mes mauvais vers, mon profond respect, mon ivresse de cœur, et daignez conserver des bontés à votre petit Suisse, etc.


4526. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 17 avril.

Plus anges que jamais, et moi plus endiablé, la tête me tourne de ma création de Ferney. Je tiens une terre à gouverner pire

  1. Réponse à la lettre 4500.
  2. Saint Luc, Évangile, chap. ii, verset 25.