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tué devant Ostende ; son frère l’a été à la malheureuse et abominable journée de Rosbach, à ce que je crois ; journée où les régiments suisses firent seuls leur devoir. Si ce n’est pas à Rosbach, c’est ailleurs ; le fait est qu’il a été tué. Celui-ci a été blessé : il sert depuis dix ans ; il a été aide-major, il veut l’être. Il faut des aides-majors qui parlent bien allemand, qui soient actifs, intelligents : il est tout cela. Enfin vous saurez de lui précisément ce qu’il lui faut ; c’est en général la permission d’aller vite chercher la mort à votre service. Faites-lui cette grâce, et qu’il ne soit point tué, car il est fort aimable, et il est neveu de cette Mme  Calendrin[1] que vous avez vue étant enfant. Madame sa mère est bien aussi aimable que Mme  Calendrin.


4458. — À M.  COLINI.
Au château de Ferney, 9 février.

Mon cher Colini, vous voilà agrégé au nombre des bons auteurs[2]. Votre livre m’a paru très-bien fait, très-commode, et très-utile : je vous en fais mes compliments et mes remerciements. Je donnerai volontiers les mains à ce que vous me proposez[3], et à tout ce qui pourra vous être agréable.

Vous m’avez envoyé une traduction d’opéra[4], et je vous envoie une tragédie[5]. Il est vrai que je ne prends pas souvent la liberté d’écrire à votre adorable maître ; mais je suis vieux, infirme, et inutile : je ne dois songer qu’à mourir tout doucement, comme font force honnêtes gens qui ne sont pas plus nécessaires que moi au tripot de ce monde. Je n’ai guère de quoi amuser un grand prince du fond de mes retraites entre le mont Jura et les Alpes : mais je lui serai attaché jusqu’au tombeau, et je vous aimerai toujours.

  1. Ou Calandrini, nommée au commencement de la lettre 3580.
  2. Colini avait envoyé à Voltaire son Discours sur l’Histoire d’Allemagne 1761.
  3. Colini avait alors l’intention de publier une édition des Œuvres de Voltaire. Voyez plus bas la permission que celui-ci lui en donna ; elle est imprimée sous forme de lettre, n° 4512.
  4. Voyez lettre 4332.
  5. Tancrède.