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que celle-là me soit imputée. Il ne s’agit donc que de dater mon épître ; je m’en rapporte à vos attentions tutélaires. Mlle  Chimène prend la plume ; voyons comment elle s’en tirera.

« M.  de Voltaire appelle M.  et Mme  d’Argental ses anges. Je me suis aperçue qu’ils étaient aussi les miens : qu’ils me permettent de leur présenter ma tendre reconnaissance.

« Corneille. »

Eh bien ! il me semble que Chimènr commence à écrire un peu moins en diagonale.

Mes anges, nous baisons le bout de vos ailes.

Denis, Corneille, et V.

4393. — À M.  COLINI.
Au château de Ferney, par Genève, 29 Décembre.

Les hivers me sont toujours un peu funestes, mon cher Colini ; vous connaissez ma faible santé ; je ne peux vous écrire de ma main. J’attendrai que la foule des compliments du jour de l’an soit passée, pour importuner d’une lettre Son Altesse électorale, et pour lui présenter mon tendre et respectueux attachement. J’ai bien peur de n’être plus en état de venir lui faire ma cour. Je mourrai avec le regret de n’avoir pu finir notre affaire de Francfort[1]. Vous savez que les événements s’y sont opposés ; on est obligé de recommencer sur nouveaux frais, quand on croyait avoir tout fini ; ce qui ne paraissait pas vraisemblable est arrivé. Soyez bien sûr que si les affaires se tournent d’une manière plus favorable, je poursuivrai celle qui vous regarde avec la plus grande chaleur.

Je m’imagine que vous aurez de beaux opéras. Les hivers sont d’ordinaire fort agréables dans les cours d’Allemagne. Pour moi, je passerai mon hiver dans mes campagnes. Il faut que je cultive mon petit territoire ; j’ai environ deux lieues de pays à gouverner. Les choses sont bien changées de ce que vous les avez vues ; je n’ai jamais été si heureux que je le suis, quoique malade et vieux. Je voudrais que vous partageassiez mon bonheur.

  1. Voyez tome XL, page 19.