Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/541

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’ai deviné qu’hier, et je suis très-bon devin. L’auteur peut avoir raison de dire qu’un fripon est un fripon ; mais il a tort, et très-grand tort, de mettre à la tête de l’ouvrage un V au lieu d’une autre lettre de l’alphabet.

Je suis très-aise, et vous aussi, qu’on vilipende un tartufe ; je suis très-fâché qu’on me fasse un honneur que je ne mérite point, et que je ne veux point. J’ai demandé justice au conseil du libraire qui abuse de la première lettre de mon nom ; je me soucie très-peu de l’obtenir, je ne me soucie que de votre amitié.

Que ferons-nous de Daumart ? Il est toujours dans le même état. Je soupçonne quelque misère dans son fémur, et je pense qu’il a beaucoup plus besoin de vos bontés que des eaux de Bonn.

Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.


4249. — À M.  DAMILAVILLE.
Aux Délices, 9 septembre.

Je suis, monsieur, plus touché que jamais de l’intérêt que vous voulez bien prendre à ce qui me regarde. Vous aimez les belles-lettres ; je les ai cultivées jusqu’à l’âge de soixante-sept ans. Je donne mes pièces aux comédiens et aux libraires sans la moindre rétribution. Je mérite peut-être quelques bontés du public ; je n’ai recueilli que des persécutions. Fréron et Pompignan m’ont poursuivi jusque dans ma retraite ; ils m’ont forcé à être plaisant sur mes vieux jours, et j’en rougis.

Je vous prie, monsieur, d’avoir la bonté de vouloir bien envoyer par la petite poste cette lettre à M.  Thieriot, qui n’est pas assez riche pour supporter souvent les frais de la poste des frontières à Paris ; c’est d’ailleurs un homme qui aime les belles-lettres autant que vous. Je vous demande bien pardon.


4250. — À M.  DE MARMONTEL.
9 septembre[1].

Dieu soit loué, mon cher ami ! Il eût été fort triste pour les rose-croix que la petite drôlerie[2] d’un des adeptes eût été sifflée. Les Fréron, les Pompignan, le Journal de Trévoux, auraient dit

  1. C’est à tort qu’on a toujours classé cette lettre à l’année 1761 ; elle est bien de 1760. (G. A.)
  2. Tancrède.