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donnent l’exemple de l’attachement et de l’obéissance. Ils condamnent, et ils couvrent d’opprobres ces factions pédantesques et furieuses, également ennemies de l’autorité royale et du repos des sujets ; il n’est aucun d’eux qui ne contribuât avec joie de la moitié de son revenu au soutien du royaume. Continuez, sire, à les seconder de votre autorité et de votre éloquence ; continuez à faire voir au monde que les hommes ne peuvent être heureux que quand les rois sont philosophes, et qu’ils ont beaucoup de sujets philosophes. Encouragez de votre voix puissante la voix de ces citoyens qui n’enseignent dans leurs écrits et dans leurs discours que l’amour de Dieu, du monarque et de l’État ; confondez ces hommes insensés livrés à la faction, ceux qui commencent à accuser d’athéisme quiconque n’est pas de leur avis sur des choses indifférentes.

Le docteur Lange dit que les jésuites sont athées, parce qu’ils ne trouvent point la cour de Pékin idolâtre. Le frère Hardouin, jésuite, dit que les Pascal, les Arnauld, les Nicole, sont athées, parce qu’ils n’étaient pas molinistes. Frère Berthier soupçonne d’athéisme l’auteur de l’Histoire générale, parce que l’auteur de cette histoire ne convient pas que des nestoriens, conduits par des nuées bleues[1], sont venus du pays de Tacin, dans le septième siècle, faire bâtir des églises nestoriennes à la Chine. Frère Berthier devrait savoir que des nuées bleues[2] ne conduisent personne à Pékin, et qu’il ne faut pas mêler des contes bleus à nos vérités sacrées.

Un gentilhomme breton ayant fait, il y a quelques années, des recherches sur la ville de Paris, les auteurs d’un Journal qu’ils appellent Chrétien[3], comme si les autres journaux étaient faits par des Turcs, l’ont accusé d’irréligion au sujet de la rue Tire-Boudin,

  1. Voyez le Dictionnaire philosophique, au mot Chine.
  2. Voyez tome XI, page 180.
  3. Cette lettre de Voltaire a été imprimée dans le Journal encyclopédique, octobre 1760, pages 105-109. Au lieu des mots : « Les auteurs d’un journal qu’ils appellent Chrétien, comme si les autres journaux étaient faits par des Turcs, l’ont accusé, etc. » on lisait : « L’abbé Trublet et consorts l’ont accusé, etc. »

    Saint-Foix ayant porté plainte contre les auteurs du Journal Chrétien, les rédacteurs insérèrent dans leur cahier d’août 1760 la note que voici : « Nous n’avions point lu les Essais historiques sur Paris ; ce livre n’étant pas, par son titre, du genre de ceux dont nous rendons compte dans notre journal. On nous envoya une lettre sur cet ouvrage ; on nous dit qu’il était imprimé sans nom d’auteur ni d’imprimeur. Dans un temps où la religion et les mœurs sont si souvent attaquées, nous crûmes que tout ce qui était contenu dans cette lettre était exact. Nous avons vu la réponse de l’auteur des Essais historiques ; nous avouons sans peine que nous n’eussions point inséré cette lettre si ces éclaircissements nous fussent