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Mords-les, qu’on accuse ou qu’on soupçonne d’avoir fait cette Vision ; item, d’avoir fait les Si et les Pourquoi ; item, les Notes sur la Prière du Déiste[1]. Je ne sais ce qui en est ; mais je sais seulement que c’est un homme de beaucoup d’esprit, ci-devant théologien ou théologal de l’Encyclopédie, que je vous avais adressé il y a un an[2] à Genève, et qui ne vous y trouva pas. Au reste, il est traité à la Bastille avec beaucoup d’égards et de ménagements. Tout Paris crie, tout Paris s’intéresse pour lui. Il y a apparence que sa captivité ne sera ni longue ni fâcheuse, et il lui restera la gloire d’avoir vengé la philosophie contre les Palissots mâles et femelles, contre les Palissots de Nancy et ceux de Versailles.

5° Palissot se vante d’avoir reçu de vous une lettre pleine d’éloges ; il va, dit-il, la faire imprimer. M. d’Argental sera à portée de lui donner le démenti.

6° Il vous mande qu’il a voulu venger Mme de Robecq et de La Marck. C’est un mensonge impudent, car depuis deux ans il est brouillé avec Mme de La Marck, et il en tient les propos les plus insolents et les plus infâmes. Elle ne l’ignore pas, non plus que M. d’Aïen, et tous deux ont regardé sa pièce comme une infamie.

7° Je ne crois pas plus que vous que Diderot ait jamais rien écrit contre ces deux femmes ; ce qui est certain, c’est que personne n’avait plus à s’en plaindre que moi, et qu’assurément je n’ai rien écrit contre elles. Mais, quand Diderot aurait été coupable, fallait-il, pour venger Mme de Robecq, attaquer Helvétius et tous les encyclopédistes, qui ne lui avaient fait aucun mal ?

8° J’ai grande envie de voir le petit poëme[3] dont vous me parlez. Je suis certain que feu Vadé a des héritiers auprès de Genève. Vous devriez bien vous adresser à eux pour me faire parvenir ce poëme ; mais, s’il n’y a rien sur la pièce des Philosophes, on ne sera pas content de feu Vadé.

9° C’est très-bien fait au chef de recommander l’union aux frères ; mais il faut que le chef reste à leur tête, et il ne faut pas que la crainte d’humilier des polissons protégés l’empêche de parler haut pour la bonne cause, sauf à ménager, s’il le veut, les protecteurs, qui au fond regardent leurs protégés comme des polissons.

10° Avez-vous lu le Mémoire[4] de Pompignan ? Il faut qu’il soit bien mécontent de l’Académie, car il ne lui en a pas envoyé d’exemplaire, quoiqu’il l’ait envoyé partout. Pour répondre à ce qu’il dit sur sa naissance, on vient, dit-on, de faire imprimer sa généalogie, qui remonte, par une filiation non interrompue, depuis lui jusqu’à son père.

  1. La Vision, les Si, les Pourquoi (qui ne sont pas ceux dont il est parlé tome XXIV, page 111), et les Notes sur la Prière du Déiste, sont en effet de Morellet. On les trouve au tome II de ses Mélanges de littérature, 1818, quatre volumes in-8o ; mais la Vision (ou Préface de la comédie des Philosophes) y est tronquée. (B.)
  2. Lisez deux ans ; et voyez la lettre 3636.
  3. Le Pauvre Diable.
  4. Celui dont il est question dans une note, tome XXIV, paye 131.