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coup de mal ; le chevalier est arrive à cul nu. Si le roi de Prusse avait été là, il aurait cru que c’était une galanterie que le tonnerre lui faisait.

Si vous me demandez de mes nouvelles, je vous dirai que j’ai eu trois ou quatre petits procès : l’un avec un prêtre, l’autre avec les fermiers généraux, un troisième contre le parlement de Bourgogne, un quatrième contre la république de Genève. Je les ai tous gagnés, tous finis gaiement, et sans que personne fût de mauvaise humeur.

Nos jardins sont charmants. Nous allons jouer la comédie dès que L’Écluse[1] aura fait des dents à notre première actrice. Le duc de Villars prétend qu’il jouera les rôles de père. Marmontel arrive avec un Gaulard[2], receveur général : voilà l’état des choses ; mais aussi rendez-moi compte des plaisirs d’Hornoy.

Dieu vous donne un jour, monsieur le chevalier[3], les mêmes sujets d’angoisse qu’à monsieur votre père ! Il me fait l’honneur de m’écrire ; il consulte Tronchin ; savez-vous bien sur quoi ? sur ce que, à l’âge de quatre-vingt-sept ans, il a le malheur de ne s’endormir qu’à quatre heures du matin, et de dormir jusqu’à dix ; d’ailleurs il est assez content de lui.

Monsieur le jurisconsulte, que faites-vous ? êtes-vous toujours gras comme un moine ? Que dites-vous de Daumart, qui ne peut plus marcher depuis quatre mois, même avec des béquilles ? Je soupçonne notre ami Tronchin de s’être fourvoyé en lui appliquant, l’année passée, un cautère pour le fortifier. J’ai peur que ce pauvre garçon ne boite toute sa vie.

Je vous embrasse tous ; je vous aime, je vous regrette,


4137. — À M. FYOT DE LA MARCHE[4].
Au château de Tournay, par Genève, pays de Gex, 28 mai 1760.

Monsieur, ayant acquis pour la vie la terre de Tournay, de M. le président de Brosses, située dans le ressort du parlement au bailliage de Gex, et étant en marché avec lui pour l’acquisition à perpétuité ; ayant de plus d’autres terres dans le pays, je compte parmi mes devoirs celui de vous présenter mon respect, et de

  1. Voyez la note, tome XXIV, page 457.
  2. Gaulard, fils d’un ancien ami de Voltaire, était receveur général des fermes à Bordeaux, d’où il revenait alors, avec Marmontel, en retournant à Paris.
  3. Le chevalier de Florian, père du fabuliste.
  4. Éditeur, Henri Beaune. — Jean-Philippe Fyot de La Marche, premier président du parlement de Bourgogne, fils et successeur du condisciple de Voltaire.