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précepteur de M.  Constant, qui écrivit le libelle, Il l’envoya aussi à Allaman pour le corriger, et à M.  de Chavanes, à Vevay, et M.  de Chavanes méprisa cette ordure. Mme  de Brenles doit embrasser notre ami Polier, et ne point juger contre lui. Il est vrai qu’il est prêtre, il est vrai que je l’aime ; mais dans l’Europe il y a trois ou quatre prêtres honnêtes gens que j’aime de tout mon cœur.

Ce n’est point lui qui m’a averti de tout ce tissu d’iniquités et de bassesses ; il a tout ignoré, et ses ennemis se sont cachés de lui. Les mêmes personnes très-respectables qui m’ont donné avis de toutes ces horreurs m’ont averti aussi qu’on imprimait à Lausanne un livre scandaleux, intitulé la Guerre de M.  de Voltaire[1], dans lequel on renouvelle l’affaire de Saurin et celle de Servet, et cent autres horreurs. On en a été instruit à Berne, et très-indigné. On a écrit à M.  le bailli de Lausanne ; il lui sera très-aisé d’arrêter le cours de ces infamies, qui peuvent troubler et déshonorer votre ville. Grasset est violemment soupçonné ; mais il y a d’autres imprimeurs. Une visite chez eux, une défense de continuer, une saisie des exemplaires, ne sont pas chose difficile. Vous pourriez très-aisément, mon cher ami, accélérer l’effet de la justice et des bontés de M.  le bailli, en le pressant d’interposer son autorité, et d’agir vivement dans une affaire où il n’y a pas un moment à perdre ; je vous aurais une obligation qui égalerait la tendre amitié que j’ai pour vous. Je vous demande instamment de m’instruire de tout ce qui se sera passé, et de n’en parler à personne.

Je vous donne avis que Mme  Denis ne sait rien de tout cela, et que je n’en ai écrit à âme qui vive à Lausanne, excepté à M.  de Tscharner.

Mille tendres respects à madame votre femme. Je vous embrasse tendrement. V.


3770. — À M.  THIERIOT.
Au château de Tournay, 7 février.

Mon ancien ami, on peut, dans une séance académique, reprocher à l’auteur du livre intitulé de l’Esprit, que l’ouvrage ne répond point au titre ; que des chapitres sur le despotisme[2] sont étrangers au sujet ; qu’on prouve avec emphase quelquefois des vérités rebattues, et que ce qui est neuf n’est pas toujours vrai ; que

  1. Voyez page 24.
  2. Discours III, chap. xvii à xxi inclusivement.