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Je crois mon commerce fini avec le chevalier Pertriset[1]. J’ai pris la liberté de lui dire tout ce que j’avais sur le cœur ; mon âge, mon ancienne liberté, les malheurs auxquels il s’expose, m’ont autorisé et m’ont peut-être conduit trop loin. Il ne tenait certainement qu’à lui de s’arranger très-bien avec son oncle ; mais il aime mieux plaider. Je suis sûr que Mlle  Pertriset en est fâchée.

Je ne sais rien, madame, des nouvelles publiques. Je plante, je bâtis ; je ne me mêle point des affaires des princes ; mais il y a une princesse aux pieds de laquelle je voudrais être.


Le Suisse V.

4122. — À M.  JEAN SCHOUVALOW.
Tournay, par Genève, 14 mai.

Monsieur, j’ai reçu aujourd’hui, par les mains du jeune M.  de Soltikof, les deux mémoires dont Votre Excellence a bien voulu le charger pour moi. Je me flatte que je recevrai autant d’instructions sur les affaires et sur la guerre que j’en reçois sur les moines et sur les religieuses. Je présume, monsieur, que vous avez reçu à présent le volume qui va jusqu’à Pultava, et que vous ne laisserez point imparfait le bâtiment que vous avez élevé. Quoique j’aie suivi en tout, dans ce premier volume, les mémoires authentiques que j’ai entre les mains, cependant si je me suis trompé en quelque chose, ou même si j’ai dit quelques vérités que le temps présent ne permette pas de mettre au jour, il sera aisé de substituer d’autres pages aux pages que vous croirez devoir être réformées. Cette histoire est votre ouvrage plutôt que le mien ; il ne doit paraître que sous vos auspices : ainsi tout doit être muni du sceau de votre approbation. Je suis bien persuadé que vous n’aurez point de vains scrupules ; votre esprit juste en est incapable. Vous savez mieux que moi ce que je vous ai toujours dit, que l’histoire ne doit être ni une satire, ni un panégyrique, ni une gazette. Il faut surtout que l’histoire puisse fouiller dans le cabinet, sans pourtant abuser de cette permission.

J’espère que la paix de l’Europe, qui ne peut nous être donnée que par vos armes victorieuses, sera l’époque de la publication de l’Histoire de Pierre le Grand. Ce sera une grande consolation pour moi de servir à réfuter les calomnies odieuses dont on a

  1. Frédéric II.