Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/355

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

immortaliser ? Je ne suis pas assez philosophe pour résister à l’une[1] ; et, pour l’autre, j’ai su vous lire, vous préférer, vous estimer. Ce sont là les titres des remerciements dont je m’acquitte, qui me font oser vous demander votre amitié, et vous assurer que j’ai l’honneur d’être, monsieur, votre tout acquise amie et très-humble servante.


Élisabeth.

4087. — À. M.  LE PRÉSIDENT DE BROSSES[2].
Aux Délices, 9 avril.

Le petit antifétichier remercie très-humblement le grand et sage antifétichier. J’ai reçu, monsieur, toutes les pancartes que vous avez eu la bonté de faire dresser pour moi. La Perrière se trouvant hors des limites de la Bâtie et de Tournay, voilà la chose plus indécise que jamais. Plus je connais cette terre et plus je vois qu’il ne faut songer qu’au rural, et très-peu au seigneurial. Mon occupation est d’améliorer tout ; et je ne songe à faire pendre personne. Un honneur qui ne produit rien est un bien pauvre honneur au pied du mont Jura.

J’ai stipulé à Son Altesse sérénissime une somme fort honnête pour son droit visigot. Je ne veux pas qu’il me traite pour Tournay comme pour Ferney. M.  le marquis de Chauvelin m’avait porté parole de sa part qu’il se réglerait suivant la manière dont M.  Fabry[3] en userait, et à proportion de ce que je payerais à M.  Fabry, son fermier. Cependant Son Altesse sérénissime a exigé 1,000 livres au delà de ce qui lui revenait, et je les ai payées pour ne pas avoir un procès avec un prince du sang.

Quant au coup de sabre donné à un Savoyard qui s’en porte très-bien, et que je fis panser à Genève à mes dépens, puisque le bailliage de Gex a trouvé bon de faire tant de bruit pour une omelette, j’ai toujours cru qu’il était dur qu’il m’en coûtât environ 600 livres sans que je sache seulement de quoi il s’agit, sans que j’aie vu les pièces du procès, sans qu’il soit dit dans l’exécutoire pourquoi on me fait payer 600 livres. M.  de Courteilles[4] a ordonné que les receveurs du domaine eussent à surseoir leur

  1. Le poëme de Jeanne d’Arc. (K.)
  2. Éditeur, Th. Foisset.
  3. Fabry, subdélégué de l’intendance de Bourgogne à Gex. Une foule de lettres de Voltaire lui sont adressées.
  4. Intendant des finances, fonctions auxquelles correspondent nos directions générales. M.  de Courteilles, ex-ambassadeur en Suisse, avait épousé une fille de l’ancien premier président Fyot de La Marche (Claude-Philippe), condisciple de Voltaire au collège Louis-le-Grand.