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qu’il mérite ce titre. Quand je le vis, il y a quarante ans[1], courant les boutiques de Paris, ni lui ni moi ne nous doutions que je serais un jour son historien. Je vous avertis qu’il a fait sortir les jésuites de ses États ; apparemment que quelque frère Berthier lui avait déplu.

Il y a longtemps que quelqu’un[2] exigea de moi des paraphrases de l’Ancien Testament ; je choisis le Cantique des cantiques et l’Écclésiaste. L’un de ces ouvrages est tendre, l’autre est philosophique. J’ai eu le plaisir de parler au cœur et à la raison ; mais je crains bien que les copies de l’Écclésiaste ne soient falsifiées : je m’en remets à la Sorbonne pour la condamnation des copistes ; je me soumets d’ailleurs au pape et à l’Église, avec toute la résignation d’un bon chrétien tel que je suis et que j’ai toujours été. Il y a longtemps que j’ai lu les quatre volumes[3] de M.  d’Alembert, et je les ai lus avec un extrême plaisir.

Je ne comprends pas comment vous ne vous êtes pas fait payer des cent vingt livres par Mme  de Fontaine. Elle est chargée, par un grand accord de famille, de vous payer cette somme, et vous recevrez votre argent tôt ou tard avec cette lettre.

Bonsoir ; je vous quitte pour Pierre le Grand. Je me flatte toujours que, quand vous aurez fait votre cours d’artillerie sous M.  Belidor[4], vous viendrez vous reposer aux Délices.


Vale, nostrorum sermonum candide judex.

(Hor., lib. 1, ép. iv.)

3871. — À MADAME DE FONTAINE.
15 juin 1759.

Si vous êtes à Paris, ma chère nièce, il faut que je vous importune encore pour ma chevalerie[5]. J’ai donné congé pour quelque temps à Pierre le Grand en faveur de mes chevaliers. Gardez-vous bien de montrer mon brouillon à qui que ce soit au monde ; ceci est un secret de famille, excepté pour M.  de Florian. Cet ouvrage est-il dans vos mains ? est-il chez M.  d’Argental ? Je n’en sais rien. Je suis toujours tout stupéfait de ne recevoir aucune nouvelle, depuis plus d’un mois, du nouvel envoyé de

  1. En 1717 ; voyez tome XXIII, page 290.
  2. La Pompadour.
  3. L’édition de 1759 des Mélanges de littérature, etc. (voyez tome XXXIX, page 375) n’a que quatre volumes in-12.
  4. Bernard Forest de Belidor, né en 1697, mort en 1761.
  5. Tancrède.