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ANNÉE 1758.
3737. — À M. LE PRÉSIDENT DE BROSSES[1].
29 décembre.

Pardon des importunités, monsieur ; vous en aurez bien d’autres. Il ne s’agit ici ni de vignes ni de prêtres : il est question de notre chemin de Genève jusqu’à Prégny.

L’illustre et sérénissime république n’est point en état de faire cette dépense. Tous nos vassaux se cotisent, et on nous demande notre portion pour le bien public et pour vous et vos hoirs. Voulez-vous, monsieur, me donner permission de concourir jusqu’à mille francs sur les douze mille livres que je dois employer ? Vous ne saunez mieux faire. Soyez bien convaincu que je suis homme à pousser la chose au delà de vingt-quatre mille. C’est ma façon, et surtout avec vous. Je suis connu pour tel dans le pays. J’ai déjà vingt ouvriers qui réparent les délabrés vignobles que noble ivrogne Chouet a négligés. Je ne suis pas comme le roi de Prusse. Je n’aime point la destruction. On va incessamment réparer votre château. Vous ne le reconnaîtrez pas. On donne un cours aux eaux. Votre forêt est dans un état affreux. J’y mettrai ordre ; tout est arrangé.

Je vous disais qu’il ne s’agissait point de vignes ! Eh ! eh ! si fait, de par saint Martin et saint Jean des Entommeures, il s’en agit : le temps est beau, et sera beau. Pour Dieu ! quatre mille ceps, et plutôt cinq mille ! Vous gagnerez le centuple. Je ne veux que le bien de la chose ; ce sera votre fils qui en boira le vin avec vous.

Je compte faire travailler les paysans à notre chemin du château, et je suppose que vous avez donné vos ordres et vos instructions pour cette besogne nécessaire. N’allez pas cependant, s’il vous plaît, vous dire seigneur de Tournay avec les Genevois : car c’est moi qui le suis, et vous m’ôteriez le plus beau fleuron de ma couronne.


<poem> Quand je ne serai plus Sosie, Sois-le : j’en demeure d’accord. </ref<
Mais tant que je le suis… je suis et serai plein d’attachement, d’estime et de respect pour vous. J’attends vos ordres pour les mille livres. V.

  1. Éditeur, Th. Foisset.