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CORRESPONDANCE.

aussi bien jouée à Paris qu’elle l’a été à Genève, à moins que ce ne soit Préville qui fasse le principal rôle. Vous avez un La Thorillière et un Bonneval[1] qui sont l’antipode du comique. Je suis toujours émerveillé de la disette où vous êtes de gens à talent. Je ne sais si la Femme qui a raison vaut quelque chose, et si l’on n’est pas plus difficile à Paris qu’à Genève. J’ignore surtout si on peut être plaisant à mon âge ; c’est à vous à en décider, à donner la pièce si vous la jugez passable, et à la jeter au feu si vous la croyez mauvaise. Pour Fanime, nous la jouerons encore à Lausanne, s’il vous plaît ; après quoi vous en serez le maître absolu, comme vous l’êtes de l’auteur. Je vais faire un voyage dont je n’ai pu me dispenser ; et le seul voyage que je voudrais faire m’est interdit. Il est triste de courir chez des princes, et de ne pas voir son ami.

J’ai vu enfin les Sept Péchés mortels[2] de M. de Chauvelin ; c’est le plus aimable damné du monde. Je le remercie du huitième péché mortel qu’il veut faire, en disant à qui vous savez[3] combien je lui suis attaché, etc.

Je me flatte que Mme d’Argental est en bonne santé. Mes respects à tous les anges. Adieu, mon cher et respectable ami. Je me console toujours de mon voyage, en espérant une lettre de vous à mon retour.


3630. — DE MADAME DU BOCCAGE
à madame du perron[4].
De Lyon, ce 8 juillet 1758.

Vous me recommandez, ma chère sœur, de visiter Nîmes ; nous avons prévenu vos désirs. M. du Boccage, malgré la goutte, à l’aide de ses porteurs, l’a parcouru avec moi.

… Revenons à ce petit temple de pierre, le plus parfait, le moins mutilé de ceux qui restent des Césars… L’abbé Barthélémy[5] a pris le dessin des

  1. Anne Maurice Le Noir de La Thorillière, reçu à la Comédie française en 1722, mort le 23 octobre 1759. — Bonneval, reçu au même théâtre en janvier 1742, se retira en 1773.
  2. C’est à l’occasion de cette pièce que Voltaire adressa à Mme de Chauvelin sept vers qui sont dans les Poésies, tome X.
  3. L’abbé de Bernis.
  4. Recueil des Œuvrcs de Mme du Boccage, Lyon, Périsse, 1762, tome III. page 395. — Marie-Anne Le Page, épouse de Fiquet du Boccage (1710-1810) à laquelle ses contemporains avaient donné pour devise : Forma Venus, arte Minerva. Ses lettres, adressées à sa sœur, Mme du Perron, ont survécu à ses poëmes et à ses tragédies.
  5. L’auteur du Voyage du Jeune Anacharsis (1716-1795).