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ANNÉE 1758.
3627. — À MADAME LA COMTESSE DE LUTZELBOURG.
Aux Délices, 26 juin.

Je fais, madame, ce voyage que je croyais ne pouvoir pas faire. Je vais à la cour palatine. Ce qui m’a déterminé, c’est que vous êtes sur la route. Je voyage à très-petites journées, en qualité de malade. Je vous demande un lit dans votre île Jard. Je me fais une idée charmante et la plus douce des consolations de vous faire ma cour, de causer avec vous sur le passé, sur le présent, et même sur l’avenir. Mon voyage sera très-court, mais il sera très-agréable, puisque j’aurai le bonheur de vous revoir.


Le Suisse Voltaire.

P. S. Je reçois dans le moment la lettre de M. l’abbé de Klinglin ; je compte l’en venir remercier incessamment.


3628. — À MON IMPITOYABLE ESCULAPE (TRONCHIN)[1].

Mon cher grand homme, le rôle de confidente n’est pas dangereux : il n’y a point de rôle comique qui ne demande plus d’action et de voix. Une confidente dit son avis tout doucement à sa maîtresse. Votre présidente a une dureté au foie que le plaisir seul peut fondre. Mais vous êtes son maître et le nôtre, et nous sommes tous vos brebis : conduisez-nous.

On parle d’une victoire du roi de Prusse ; on parle de la suite de la victoire[2] du prince de Brunswick ; on parle d’horreurs. À Paris, on murmure ; à Versailles, on ne dit mot. Intérim vale.


3629. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 30 juin.

Mon cher ange, quand j’allais partir pour Manheim, Mme du Boccage est venue juger entre Genève et Rome, et j’ai retardé mon voyage. On a donné pour elle une représentation de la Femme qui a raison ; elle en a été si contente qu’elle a voulu absolument vous l’apporter. J’ai obéi dès qu’elle m’a prononcé votre nom. Il est vrai que nous n’espérons, ni elle ni moi, que cette pièce soit

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. La victoire de Crevelt, remportée sur les Français le 23 juin.