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imprimé mes petits sermons : je les ai rendus beaucoup plus corrects et plus édifiants, avec de belles notes fort instructives pour les curieux. Je vous enverrai tout cela comme je pourrai. Vous voyez que je suis bon Français ; je combats les Anglais à ma façon. Je suis comme Diogène, qui remuait son tonneau pendant que tout le monde se préparait à la guerre dans Athènes.

Je pourrai bien écrire quelque petite flagornerie[1] à notre docteur, si j’ai quelques moments heureux ; mais à présent à peine puis-je dicter une mauvaise lettre en prose, et vous dire combien je vous aime.

Bonsoir, ma chère nièce ; j’embrasse votre frère, et fils, et mari, et tout ce que vous aimez.


3158. — À M. TRONCHIN[2],
médecin.
Aux Délices, 18 avril.

Depuis que vous m’avez quitté,
Je retombe dans ma souffrance ;
Mais je m’immole avec gaité,
Quand vous assurez la santé
Aux petits-fils des rois de France.


Votre absence, mon cher Esculape, ne me coûte que la perte d’une santé faible et inutile au monde. Les Français sont accoutumés à sacrifier de tout leur cœur quelque chose de plus à leurs princes.

Monseigneur le duc d’Orléans et vous, vous serez tous deux bénis dans la postérité.


Il est des préjugés utiles,
Il en est de bien dangereux ;
Il fallait, pour triompher d’eux,
Un père, un héros courageux,
Secondé de vos mains habiles.
Autrefois à ma nation
J’osai parler dans mon jeune âge
De cette inoculation[3]

  1. Voyez la lettre suivante,
  2. Théodore Tronchin, fils d’un riche banquier de Genève, y naquit en 1709, fut élève de Boerhaave, et devint lui-même un célèbre médecin. Il est mort à Paris le 30 novembre 1781.
  3. Voyez tome XXII, page 111.