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êtes né sous la domination de l’empereur. Plus heureux qui est né libre ! Je vous embrasse.


3538. — À M. TRONCHIN, DE LYON[1].
Lausanne, 26 janvier.

Le départ de M. l’abbé de Saint-Germain des Prés[2] et les nouvelles mesures qu’on prend ne laissent guère imaginer qu’on veuille entrer dans les sages mesures d’un homme que son esprit, ses lumières et son expérience, devraient faire écouter. L’humeur d’un côté, certain intérêt de l’autre, auront vraisemblablement plus de crédit de près que la raison qui vient de loin.


3539. — À MADAME DE FONTAINE,
à paris.
Lausanne, 26 janvier.

Je reçois votre lettre du 19, ma chère nièce, et je me flatte que vous aurez la bonté de m’accuser la réception de celles que je vous ai envoyées par M. d’Alembert. Il faut d’abord que je justifie M. Constant[3], que vous appelez gros Suisse. Il n’est ni Suisse, ni gros. Nous autres Lausannais, qui jouons la comédie, nous sommes du pays roman, et point Suisses. Il envoya, avant de partir, chercher la boîte chez Mme de Fontaine. On alla chez la fermière générale, qui envoya promener le courrier, et qui dit qu’elle n’envoyait jamais rien à Lausanne.

On peint, il est vrai, la charpente de mon visage ; mais c’est à condition que vous le copierez. Votre sœur attend l’habit d’idamé avec plus d’impatience que je n’attends ceux[4] de Narbas et de Zamti. Si elle avait bien fait, elle se serait habillée à sa fantaisie, sans suivre la fantaisie des autres, et sans vous donner tant de peines. Pour moi, avec sept ou huit aunes d’étoffe de Lyon, j’aurais très-bien arrangé mes guenilles de vieux bonhomme. Je n’aime à imiter ni le jeu, ni le style, ni la manière de se mettre ; chacun a son goût, bon ou mauvais. Mme Denis a cru qu’on ne pouvait avoir une jarretière bien faite sans la faire venir de Paris à grands frais ; elle voulait que je fisse faire mon jardin des Délices à Paris ;

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Le comte de Clermont, qui remplaçait Richelieu.
  3. Sans doute Samuel Constant de Rebecque ; voyez une note de la lettre 3185.
  4. Voltaire avait chargé Lekain de cette commission.