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ait données dans ce siècle. Je vous réponds qu’il va substituer les épigrammes aux épîtres chagrines. Il ne fait pas bon à présent pour les Français dans les pays étrangers. On nous rit au nez, comme si nous avions été les aides de camp de M. de Soubise. Que faire ? Ce n’est pas ma faute. Je suis un pauvre philosophe qui n’y prends ni n’y mets ; et cela ne m’empêchera pas de passer mon hiver à Lausanne, dans une maison charmante, où il faudra bien que ceux qui se moquent de nous viennent dîner.


Tros Rutulusve fuat, nuUo discrimine habebo.

(Æn., X, v. 108.)

Ce qui me console, c’est que nous avons pris dans la Méditerranée un vaisseau anglais chargé de tapis de Turquie, et que j’en aurai à fort bon compte. Cela tient les pieds chauds, et il est doux de voir de sa chambre vingt lieues de pays, et de n’avoir pas froid. S’il y a quelque chose de nouveau à Paris, mandez-le-moi, je vous en prie ; mais vous n’écrivez que par boutades. Ayez vite la boutade d’écrire à votre ancien ami, qui vous aime.


3458. — À MADAME D’ÉPINAI.

André est un paresseux qui n’a pas porté mes billets écrits hier au soir, selon ma louable coutume. Ces billets demandaient les ordres du ressusciteur et de la ressuscitée. Le carrosse ou le fiacre le plus doux est à leurs ordres, à midi.

Je n’ai pas un moment de santé ; je ne mange plus, et j’ai des indigestions. Je suis sans inquiétude, et je ne dors point. C’est la vecchiaia, la debolezza ; et c’est ce qui fait que je n’ai pu encore aller chez les dévotes[1] du révérend père Tronchin, À midi précis le fiacre part.


Frère V.

3459. — DE MADAME LA MARGRAVE DE BAIREUTH[2].
Le 23 novembre.

Mon corps a succombé sous les agitations de mon esprit, ce qui m’a empêchée de vous répondre. Je vous entretiendrai aujourd’hui de nouvelles bien plus intéressantes que celles de mon individu. Je vous avais mandé

  1. Mesdames d’Épinai, de Montferrat, etc.
  2. Cette lettre contient la suite du récit fait par la margrave dans celle qui porte le n° 3429.