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et moi, de l’intérêt vif que nous y prenons, et de notre empressement à recevoir ses ordres.


3451. — À M. TRONCHIN, DE LYON[1].
Délices, 17 novembre.

Voici encore une requête de l’insatiable Mme Denis. Ces Parisiennes-là n’ont jamais fini : elles épuisent la patience et les bontés de M. Tronchin ; elles mettent leur oncle à la besace. Cependant je crois que le roi de Prusse y met l’armée de Soubise[2] ; on s’enfuit, dit-on, de tous côtés, sans vivres et sans équipages. Voilà un nouveau coup de la fortune. Cette bataille peut laisser le roi de Prusse maître absolu de la Saxe, et le mettre au printemps en état de faire face de tous côtés. Il peut arriver à nos troupes ce qui leur arriva en 1742 dans ces quartiers-là. Je doute qu’à présent on demande grâce.


3452. — À MADAME LA COMTESSE DE LUTZELIBOURG.
Aux Délices, 19 novembre.

Je n’ai que le temps et à peine la force, madame, de vous dire en deux mots combien je suis affligé du dernier malheur[3]. On doit le sentir plus vivement à Strasbourg qu’ailleurs. Je ne sais si monsieur votre fils était dans cette armée. En ce cas, je tremble pour lui. Si vous avez une relation, je vous supplie de vouloir bien me l’envoyer.

Mme Denis est très-malade. Je la garde. Pardon d’écrire si peu. Je répare cela en aimant beaucoup. Vous connaissez mon tendre respect.


3453. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Au Délices, 19 novembre.

Vous avez un cœur plus tendre que le mien, mon cher ange ; vous aimez mieux mes tragédies que moi. Vous voulez qu’on parle d’amour, et je suis honteux de nommer ce beau mot avec ma barbe grise. Toutes mes bouteilles d’eau rose sont à l’autre bout du grand lac, à Lausanne. J’y ai laissé Fanime et la Femme

  1. Éditeurs, de Cayrol et Franrois.
  2. La bataille de Rosbach avait été livrée le 5 novembre.
  3. Celui du 5 novembre, à Rosbach, où les princes de Saxe-Hildbour-Hausen et Rohan-Soubise perdirent tout, fors la vie. (Cl.)