Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conduit dans la morale et dans l’histoire. S’il se trouvait dans ces écrits quelques expressions répréhensibles, je serais le premier à les condamner et à les réformer.

Au reste, puisque vous avez rassemblé mes ouvrages, c’est-à-dire les fautes que j’ai pu faire, je vous déclare que je n’ai point commis d’autres fautes ; que toutes les pièces qui ne seront point dans votre édition sont supposées, et que c’est à cette seule édition que ceux qui me veulent du mal ou du bien doivent ajouter foi. S’il y a dans ce recueil quelques pièces pour lesquelles le public ait de l’indulgence, je voudrais avoir mérité encore plus cette indulgence par un plus grand travail. S’il y a des choses que le public désapprouve, je les désapprouve encore davantage.

Si quelque chose peut me faire penser que mes faibles ouvrages ne sont pas indignes d’être lus des honnétes gens, c’est que vous en êtes les éditeurs. L’estime que s’est acquise depuis longtemps votre famille dans une république où règnent l’esprit, la phlosophie, et les mœurs ; celle dont vous jouissez personnellement, les soins que vous prenez, et votre amitié pour moi, combattent la défiance que j’ai de moi-même. Je suis, etc.


3145. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 1er avril.

Je reçois votre lettre du 24 mars, mon divin ange ; que de choses j’ai à vous dire ! Mme d’Argental a toujours mal au pied ! et le messie Tronchin est à Paris ! Il dit que je suis sage et que je me porte bien : ah ! n’en croyez rien. Mon procureur dit qu’il m’avait envoyé une procuration : c’est ce qu’un procureur doit envoyer ; mais il n’en était rien avant vos bontés et avant que M. l’abbé de Chauvelin eût daigné employer auprès de lui son éloquence. J’écris[1] à M. l’abbé de Chauvelin pour le remercier ; je ne sais point sa demeure ; je lui écris à Paris.

Vous me parlez d’une Mlle Guéant[2] ; voilà ce que c’est que d’écrire trop tard ! les Bonneau[3] sont plus alertes. Un Bonneau

  1. Cette lettre nous est inconnue. (Cl.)
  2. Mlle Guéant était une jeune actrice d’une fiqure charmante, dit Grimm dans sa Correspondance littéraire du 1er octobre 1758. Née vers la fin de 1734, elle fut reçue le 12 décembre 1754 au Théâtre-Français, où elle avait paru, dès l’àge de trois et de six ans, dans des rôles d’enfants. Elle mourut, le 12 octobre 1758, de la petite vérole. (Cl.)
  3. Voyez la Pucelle, chant I, vers 54 et 60.