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puisse me donner les lumières que j’aurais désirées. Pas un mot sur l’établissemenl des manufactures, rien sur les communications des fleuves, sur les travaux publics, sur les monnaies, sur la jurisprudence, sur les armées de terre et de mer. Ce ne sont que des compilations très-défectueuses de quelques manifestes, de quelques écrits publics, qui n’ont aucun rapport avec ce qu’a fait Pierre Ier le grand, de nouveau, et d’utile. En un mot, monsieur, ce qui mérite le mieux d’être connu de toutes les nations ne l’est en effet de personne. J’ose vous répéter que rien ne vous fera plus d’honneur, rien ne sera plus digne du règne de l’impératrice que d’ériger ainsi, dans toute la terre, un monument à la gloire de son père. Je ne ferai qu’arranger les pierres de ce grand édifice. Il est vrai que l’histoire de ce grand homme doit être écrite d’une manière intéressante : c’est à quoi je consacrerai tous mes soins. J’observerai d’ailleurs avec la plus grande exactitude tout ce que la vérité et la bienséance exigent. Je vous enverrai tout le manuscrit dès qu’il sera achevé. Je me flatte que ma conduite et mon zèle ne déplairont pas à votre auguste souveraine, sous les auspices de laquelle je travaillerai sans discontinuer, dès que les mémoires nécessaires me seront parvenus.


3394. — À MADAME LA MARGRAVE DE BAIREUTH[1].
Aux Délices, août 1757.

Madame, mon cœur est touché plus que jamais de la bonté et de la confiance que Votre Altesse royale daigne me témoigner. Comment ne serais-je pas attendri avec transport ? Je vois que c’est uniquement votre belle âme qui vous rend malheureuse. Je me sens né pour être attaché avec idolâtrie à des esprits supérieurs et sensibles qui pensent comme vous. Vous savez combien, dans le fond, j’ai toujours été attaché au roi votre frère. Plus ma vieillesse est tranquille, plus j’ai renoncé à tout ; plus je me fais une patrie de la retraite, et plus je suis dévoué à ce roi philosophe. Je ne lui écris rien que je ne pense du fond de mon cœur, rien que je ne croie très-vrai ; et, si ma lettre paraît convenable à Votre Altesse royale, je la supplie de la protéger auprès de lui comme les précédentes.

Votre Altesse royale trouvera dans cette lettre des choses qui se rapportent à ce qu’elle a pensé elle-même. Quoique les pre-

  1. Revue française, mars 1866 ; tome XIII, page 360.