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Et qui sait si, au printemps, vous n’irez pas encore commander quelque armée ? Qui sait si vous ne ferez pas gagner des batailles à l’impératrice ? Vous n’aviez pas déplu à sa mère, vous seriez le vengeur de la fille. Les grenadiers français ne seraient pas fâchés de vous suivre, et d’opposer leur impétuosité aux pas mesurés des Prussiens. Milord Maréchal[1], qui m’est venu voir dans mon trou ces jours passés, dit des choses bien étonnantes. Il prétend qu’à la dernière bataille ce sont huit bataillons seulement qui ont soutenu tout l’effort de l’armée autrichienne. Je m’imagine que contre vous il en aurait fallu un peu davantage. Je voudrais vous y voir, tout paralytique que je suis. Il me semble que vous êtes fait pour notre nation, et elle pour vous.

Nous avons ici le frère d’un nouveau secrétaire d’État d’Angleterre ; il chante vos louanges, et non pas celles de son pays. Il vient chez moi beaucoup d’Anglais ; jamais je ne les ai vus si polis : je pense qu’ils vous en ont l’obligation.

Commandez des armées ou donnez des fêtes ; quelque chose que vous fassiez, vous serez toujours le premier des Français à mes yeux, et le plus cher à mon cœur, qui vous appartient avec le plus profond respect. Ma nièce partage mes sentiments. J’écris rarement ; mais que voulez-vous que dise un solitaire, un Suisse, un malingre ?


3269. — À M. DE CHENEVIÈRES[2].

Grand merci, mon cher confrère, de votre petite pastorale[3].


Vous possédez la langue de Cythère ;
Si vos beaux faits égalent votre voix,
Vous êtes maître en l’art divin de plaire.
En fait d’amour, il faut parler et faire ;
Ce dieu fripon ressemble assez aux rois :
Le bien servir n’est pas petite affaire.
Hélas ! Il est plus aisé mille fois
De les chanter que de les satisfaire.

    la survivance de la charge de premier gentilhomme de la chambre, charge à raison de laiquele le maréchal de Richelieu fut de service, ou d’année, en 1757.

  1. George Keith.
  2. François de Cheneviéres, premier commis au bureau de la guerre, né le 22 novembre 1699, à la Rochefoucauld, mort le 13 novembre 1779, a publié Détails militaires, 1750-68, six volumes in-12o, et les Loisirs de M. de C***, 1764, deux volumes petit in-12o. (B.)
  3. Il avait envoyé son ballet de Mysis et Glaucé à Voltaire.