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sans me citer et sans alléguer les raisons que je vous apporte.

Le projet de faire un opéra de ma tragédie de Mérope n’est pas si étrange. J’ai été tout étonné de recevoir un gros paquet du roi de Prusse ; il contenait ma tragédie de Mérope, qu’il s’est donné la peine de tourner en vers lyriques, et il m’avertit qu’il faisait cet ouvrage en travaillant à son traité. Voilà une anecdote assez singulière.

J’ai lieu de croire, mon cher monsieur, que vôtre discours sur Lisbonne est imprimé actuellement à Rouen. La personne à qui je l’ai confié m’apprend qu’elle l’a donné à un libraire de ce pays-là. J’espère vous en envoyer bientôt des exemplaires.

Mon sermon en vers[1] ne vaut pas le vôtre en prose, et je ne le crois pas fait pour l’impression. Cependant, si vous voulez vous en amuser avec M.  le banneret de Freudenreich et n’en donner aucune copie, j’aurai l’honneur de vous l’envoyer.

Je conviens que le rôle de la France n’est pas brillant à présent ; non illi imperium pelagi sævumque tridentem..

Conservez vôtre amitié à vôtre très-tendre serviteur et malade. V.


3117. — À M.  D’ALEMBERT.
À Monrion, 10 février.

Je vous envoie, mon cher et illustre confrère, deux phénomènes littéraires : l’un des deux vous regarde ; et vous verrez quels remerciements vous devez à M.  Formey[2], secrétaire de vôtre Académie de Berlin. Pour moi, j’en dois de très-sincères au roi de Prusse. Vous voyez qu’il m’a fait l’honneur de mettre en opéra français ma tragédie de Mèrope : en voici la première scène. J’ignore encore s’il veut qu’on mette en musique ses vers français, ou s’il veut les faire traduire en italien. Il est très-capable, comme vous savez, de faire la musique lui-même ; sans cela, je prierais quelque grand musicien de Paris de travailler sur ce canevas. Les vers vous en paraîtront fort lyriques, et paraissent faits avec facilité. Il ne m’a jamais fait un présent plus galant. Dès que je serai de retour à mes petites Délices, je travaillerai à Français et à Histoire, et je serai à vos ordres, sauf à être réduit par le sieur Formey. Mes compliments à tous les encyclopédistes.

  1. Le Poëme sur le Désastre de Lisbonne.
  2. Formey avait annoncé le projet de réduire l’Encyclopédie.