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maîtresse des cœurs combien je révère la vraie Dorothée[1], la plus respectable, la plus aimable princesse de la terre, à qui je serai attaché pour jamais avec le plus profond respect.


3115. — À M. TRONCHIN, DE LYON[2].

La nouvelle du saccagement de Philadelphie se confirme-t-elle ? Est-on bien ébaubi du traité du roi de Prusse ? Ce monarque, pendant qu’il faisait son traité, faisait un opéra en vers français de ma tragédie de Mérope ; il vient de me l’envoyer. Ainsi M. le cardinal de Tencin, qui est si tendrement attaché à ce grand homme, pourrait me recevoir à bras ouverts, puisque je suis dans une si belle correspondance.


3116. — À M. BERTRAND,
pasteur de l’église française, à berne[3].
À Monrion, 10 février 1756.

Le projet de M. Formey suppose, mon cher philosophe, quelque chose de plus que du courage, s’il veut faire lui seul une encyclopédie ; c’est beaucoup pour un seul homme. S’il veut retrancher de cet ouvrage les mathématiques et les arts, qui en sont le fondement, c’est le réduire à rien, c’est faire un dictionnaire de choses triviales. Joignez à la singularité de ce projet la mauvaise grâce de se servir du travail d’autrui, le risque de le gâter, le soupçon d’avoir fait cette manœuvre par intérêt, et vous m’avouerez alors que ses amis devraient le détourner d’un tel dessein. Le grand nombre de savants qui travaillent à l’encyclopédie s’élèvera contre lui, ils en auront d’autant plus de droit que lui-même se joignit à eux dans les commencements, et se proposa pour les aider dans plusieurs articles de philosophie. Il envoya ses articles, on les lui paya noblement et on s’en servit peu. Vous voyez combien de raisons doivent concourir à lui faire abandonner son idée. Si vous êtes son ami, je pense que vous lui rendriez un vrai service de le détourner d’une telle entreprise,

  1. Personnage de la Pucelle.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Cette lettre, et les suivantes adressées à la même personne, ont été publiées dans le Magasin universel, 1838-1839, tome VI. Elles sont écrites entièrement de la main de Voltaire.