Monsieur, si j’écrivais autant de lettres que les libraires m’imputent de livres, vous seriez souvent importuné des miennes. Mais un pauvre malade solitaire ne peut guère écrire. Je fais trêve à tous mes maux pour vous souhaiter, aussi bien qu’à Mme Gottsched, une bonne année et toutes les prospérités que vous méritez l’un et l’autre. Je commence cette année par vous demander hardiment une grâce : c’est de vouloir bien honorer d’une place dans votre journal une lettre à l’Académie française, que j’ai l’honneur de vous envoyer[2]. Il est de l’intérêt de la vérité, et du mien, que cette lettre soit connue. Faites la grâce entière : je vous supplie que, par votre entremise, les gazettes allemandes fassent mention du désaveu[3] que vous trouverez joint à la lettre. Il est honteux que les libraires se mettent en possession d’imprimer ce qu’ils veulent sous le nom d’un homme vivant[4]. Tous les gens de lettres y sont intéressés ; et à qui la gloire des lettres doit-elle être plus chère qu’à vous, qui en êtes l’ornement et le soutien ? Je vous aurai[5] beaucoup d’obligation, et j’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments qui vous sont justement dus, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.
Mon cher Walther, on me mande qu’on a imprimé en Hollande, et que vous voulez réimprimer en Allemagne une prétendue Histoire de la Guerre de 1741. L’amitié que j’aurai toujours pour vous m’oblige de vous avertir que cette Histoire, qu’on met impudemment sous mon nom, n’est point de moi. Vous le verrez