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vous aime toujours au bord de mon lac, comme lorsque nous soupions ensemble. Adieu. On n’écrivait ni à Platon ni à Socrate : Votre très-humble serviteur.


3035. — À. M. DE BRENLES.


Je profite d’un petit moment de santé, ou plutôt de relâchement de mes maux, pour présenter mes tendres respects à M. et à Mme de Brenles. La maladie de M. de Giez m’a empêché, il y a un mois, d’aller à Monrion, et la mienne maintenant me retient auprès de Genève. Je vois bien que nous retournerons à peu près dans le même temps à Lausanne : ce sera là que je remercierai Mme de Brenles. Ses vers[1] sont le prix le plus flatteur de l’Orphelin de la Chine. Je suis actuellement dans l’incapacité de répondre, même en prose : il ne me reste plus que le sentiment ; mais ce n’est pas assez, il faudrait l’exprimer, et ce n’est pas une besogne de malade.

M. Dupont devait venir à Monrion cet automne ; voilà les choses furieusement dérangées. On n’éprouve dans la vie que des contradictions, bien heureux encore quand on s’en tient là. J’ai à soutenir tous les maux du corps et de l’âme ; l’espérance de revoir M. et Mme de Brenles me soutient. Nous leur renouvelons, Mme Denis et moi, les plus sincères amitiés.

Adieu, couple respectable et aimable, jusqu’au moment où Monrion nous rassemblera. V.


3036. — À M. TRONCHIN, DE LYON[2].
Délices, le 15 octobre 1755.

J’ai lu toutes les discussions sur la guerre. Tout ce que je comprends, c’est que nos plénipotentiaires au congrès d’Utrecht ne connaissaient pas trop l’Acadie, et cela n’arrive que trop souvent. Il faudrait que les autres eussent la bonté de faire graver une carte, Mais les cartes seront toujours embrouillées, et les Français ont la mine de perdre à ce jeu, puisqu’ils jouent avec

  1. Mme de Brenles composait des poésies fugitives assez agréables ; elle traduisit même le Caton d’Addison, en faisant usage des rimes croisées, à l’exemple de Voltaire dans Tancrède. Mme de Brenles, Étiennette Chavannes, devint veuve vers le commencement de novembre 1771, et mourut en 1775. L’un de ses frères est nommé dans la lettre de Voltaire au pasteur Bertrand, du 30 janvier 1759. (Cl.)
  2. Revue suisse, 1855, page 402.