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ici, et ce n’est que dans votre belle âme que vous trouvez des ressources. C’est à cette âme noble et tendre que je serai attaché toute ma vie avec les sentiments les plus inviolables et les plus respectueux. Vous savez que ma nièce pense comme moi.

Permettez que je revienne à la pièce qui est sous votre protection. Je vous demande en grâce qu’on la joue à Fontainebleau, telle que je l’ai faite, telle que Mme de Pompadour l’a lue et approuvée, telle que j’ai l’honneur de vous l’envoyer, et non telle qu’elle a été défigurée à Paris. En vérité, je ne puis concevoir comment elle a pu avoir quelques succès avec tant d’incongruités. Il faut que Mlle Clairon soit une grande enchanteresse.


3013. — À MADAME LA DUCHESSE DE SAXE-GOTHA[1].
Aux Délices, 12 septembre 1755.

Madame, ce n’est pas Jeanne que je mets cette fois-ci à vos pieds, c’est cet Orphelin de la Chine. Votre approbation m’a donné la hardiesse de le faire jouer à Paris ; et puisque ces magots chinois ont trouvé grâce devant vos yeux, il fallait bien qu’ils réussissent en France. Les Français qui ont du goût, madame, sont faits pour penser comme Votre Altesse sérénissime. J’ignore si elle a reçu la lettre que j’eus l’honneur de lui écrire, il y a plus d’un mois, en faveur de Jeanne. Je lui demandais ses ordres ; je lui disais, dans ma lettre, que j’avais donné à cette grosse et singulière héroïne un habit décent, pour qu’elle pût faire la révérence à la petite-fille des héros, à celle qui est l’honneur de son sexe.

Je suis toujours, madame, dans cette maison que monseigneur le prince votre fils a honorée de son séjour. Plus je l’embellis, plus je regrette de n’être pas à vos pieds. Il n’y a rien à mes yeux de beau que votre cour ; je n’aurais jamais dû la quitter. Daignez, madame, me conserver des bontés si chères et si consolantes. Puissiez-vous jouir aussi longtemps que je le désire, vous et toute votre famille, et la grande maîtresse des cœurs, d’un bonheur que vous méritez si bien !

Je renouvelle à Votre Altesse sérénissime mon inviolable attachement et mon très-profond respect.

    pour son héros, croyait que celui-ci, à la bataille de Fontenoy, avait donné le premier l’avis de faire avancer quatre canons contre le front de la colonne anglaise. (Cl.)

  1. Éditeurs, Bavoux et François.