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vite profiter des bontés de M. de La Marche, de celles de M. de La Valette, et surtout des vôtres. Mais je suis hors d état de voyager. Il faut que je m’en tienne à mes montagnes et à mon lac. Je me souviendrai toujours de vous dans ma solitude, où j’oublie tout le reste du monde de tout mon cœur. Comptez sur mes sentiments, et jamais sur mes compliments. V.


2993. — À M. COLINI.
Aux Délices. 23 août.

Mon cher Colini, je ne connais point ce Prieur ; dites-lui que, s’il est sage, il doit m’écrire. Il fait trop chaud pour montrer cinq magots de la Chine à quinze cents badauds. Il doivent avoir été fort mal reçus ; cette marchandise n’était bonne que pour Pékin.

On m’a volé à Berlin, en Hollande, à Genève, à Paris ; on s’empare de mon bien comme si j’étais mort, et on le dénature pour le mieux vendre. Il faudrait traiter tous ces fripons de libraires comme j’ai fait traiter Grasset, qu’on a mis en prison et qu’on a chassé de la ville ; et il est bon qu’on le sache.

Je vous embrasse.

Si vous m’aviez instruit plus tôt du nom de ce Prieur[1], il aurait eu déjà affaire avec les supérieurs. J’ai perdu votre adresse, envoyez-la-moi. V.


2994 — À. M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU[2].
À mes prétendues Délices, 26 août.

Vous ne m’avez jamais mandé, mon héros, si vous avez reçu le petit paquet contresigné. Vous avez dédaigné l’hommage de mes magots ; on leur a cassé le nez et les oreilles sur votre théâtre ; scènes, et noms, et vers, ont été changés ; tout a été estropié, excepté par Mlle  Clairon. On a fait jouer un rôle d’un mari aimé par un bonhomme de soixante-quatorze ans, qui n’a pas plus de dents que moi. Lekain n’a pas été entendu, et il est fort propre pour les rôles muets. On voit bien que vous ne vous souciez guère des spectacles, à la manière dont ils vont.

J’ai dû présumer que vous ne faites pas plus de cas de ma

  1. Voyez la lettre 2944.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.