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vérole, et que Mme la Duchesse d’Aumont vivrait encore si M. le duc d’Aumont était né à Lausanne ? Ce Lausanne est devenu un singulier pays. Il est peuplé d’Anglais et de Français philosophes, qui sont venus y chercher de la tranquillité et du soleil. On y parle français, on y pense à l’anglaise. On me presse tous les jours d’y aller faire un tour. Mme la duchesse de Gotha demande à grands cris la préférence ; mais son pays n’est pas si beau, et on n’y est pas à couvert des vents du nord. Il n’y a à présent que les montagnes cornues de Plombières qui puissent me plaire si vous y venez. Nous verrons si je les changerai en eaux d’Hippocrène. Adieu, mon cher et respectable ami ; je vous embrasse avec la plus vive tendresse.


2731. — DE FRÉDÉRIC,
prince héréditaire de hesse-cassel.
Cassel, le 16 avril.

Il y a longtemps, mon cher ami, que je vous cherche partout, et que je ne puis rien entendre de certain de l’endroit de votre séjour. Dernièrement, un M. de Wakenits, qui vient de Gotha, m’assura que vous étiez à Colmar, et que vous aviez envoyé le deuxième tome des Annales de l’Empire à madame la duchesse, et que vous y aviez ajouté une dédicace[1], à la fin, pour cette princesse. Il m’est donc impossible de garder plus longtemps le silence sans vous demander des nouvelles de votre santé ; j’y prends trop de part pour tarder davantage à m’en informer. J’ai lu avec plaisir le premier tome de vos Annales. On y remarque partout le feu qui brille dans tous vos écrits ; et, quoique cette façon d’écrire ne soit pas en elle-même si agréable que l’histoire, vous y avez donné cependant une tournure qui convient et qui est digne de son auteur, dont les ouvrages l’immortaliseront.

J’ai fait venir, il y a quelque temps, de Hollande, tous ces ouvrages. Je les relis tant que je peux, et je souhaiterais d’avoir plus de mémoire pour n’en rien perdre. Ils ne quittent point ma table ; et d’abord que j’ai un moment à moi je m’entretiens avec vous par le moyen de vos ouvrages. Permettez que je vous fasse ressouvenir que vous m’en avez promis une édition complète.

Faites-moi le plaisir de me donner bientôt de vos nouvelles. Il y en a qui disent que vous allez à Baireuth ; d’autres, que vous retournez à Berlin. J’y prends trop de part pour ne pas m’y intéresser vivement. Votre amitié me sera toujours précieuse ; comptez sur un parfait retour de mon côté, étant avec toute la considération imaginable, etc.


Frédéric, prince héréditaire de Hesse.
  1. Voyez cette pièce, tome XIII, page 617.