Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/212

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cien magistrat qui s’est avisé d’apprendre l’anglais à l’âge de soixante et dix ans, et qui en sait assez pour lire les bons auteurs avec plaisir ? Voyez si vous voulez en faire autant. Je vous avertis qu’il n’y a point de disputes en Angleterre sur les participes ; mais je crois que vous vous en tiendrez à notre langue, que vous épousez, et que vous embellissez.

Pardon de ne pas vous écrire de ma main ; je suis bien malade. J’irai bientôt trouver La Chaussée[1]. Je vous embrasse.


2726. — À M. DE MALESHERBE[2].
À Colmar, 29 mars.

Je vous demande pardon de l’indiscrétion qu’on a eue d’adresser des lettres pour moi, du fond de l’Espagne[3], chez feu M. de La Reynière, et je vous remercie de toutes vos bontés. Je serais très-fâché d’en abuser. Je vous ai seulement supplié, monsieur, de vouloir bien, dans l’occasion, rendre témoignage à la vérité, que vous connaissez. Non-seulement je n’ai point envoyé directement le manuscrit de la prétendue Histoire universelle à Jean Néaulme, mais je ne l’ai pas envoyé indirectement. Il avoue lui-même dans sa préface qu’il tient ce manuscrit, si infidèle et si tronqué, d’un homme de Bruxelles, lequel appartient à M. le prince Charles de Lorraine. Je me suis plaint de cet infâme procédé dans toutes les gazettes. J’ai condamné l’édition de Néaulme ; et lorsque ce malheureux libraire m’a écrit en dernier lieu que ce domestique du prince Charles était un très-galant homme, je lui ai répondu que ce galant homme a fait une action indigne de vendre un très-mauvais manuscrit qui ne lui appartenait pas.

Le roi a lu le livre ; il a lu aussi le procès-verbal. Je sais bien qu’on lui a dit, ainsi qu’à Mme  de Pompadour, que je n’étais pas si fâché de cette édition que je le paraissais : et voilà pourquoi, monsieur, j’ai pris la liberté de vous supplier de détromper Mme  de Pompadour, quand l’occasion se présenterait, et de vouloir bien détruire d’un mot de votre bouche la mauvaise foi et la calomnie, que je ne peux plus supporter.

Quant aux Annales de l’Empire, que j’ai composées par pure complaisance pour Mme  la duchesse de Saxe-Gotha, je les avouerai

  1. Mort le 14 mars 1754 ; voyez tome XXIII, page 485.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. De Cadix, où il avait placé des fonds.