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2706. — À M. LE CHEVALIER DE LA TOUCHE[1].
À Colmar, 3 mars.

Monsieur, vous n’ignorez pas qu’il parut, il y a plusieurs mois, un écrit abominable et non moins ridicule, où l’on ose outrager, avec une insolence punissable, la famille royale du pays où vous résidez.

Je crois devoir vous envoyer le mémoire ci-joint[2]. Je vous supplie très-instamment d’en vouloir bien faire l’usage que votre bonté, votre justice et votre sagesse, vous conseilleront. Ce serait assurément le plus grand de tous mes malheurs si la calomnie pouvait prévaloir. La bienveillance que vous m’avez témoignée me met en droit de la réclamer. J’ai l’honneur d’être avec tous les sentiments que je vous dois, etc.


Voltaire,
gentilhomme ordinaire de la chambre du roi.

2707. — À M. LE MARQUIS D’ARGENS.
À Colmar, le 3 mars.

Frère, mes entrailles fraternelles, qui s’émeuvent, me forcent à vous saluer en Belzébuth. Je suis dans une ville moitié allemande, moitié française, et entièrement iroquoise, où l’on vous brûla, il y a quelque temps, en bonne compagnie. Un brave iroquois jésuite, nommé Aubert, prêcha si vivement contre Bayle et contre vous que sept personnes chargées du sacrifice apportèrent chacune leur Bayle, et le brûlèrent dans la place publique avec les Lettres juives. Je vous prie de m’envoyer le Bayle qui est dans la bibliothèque de Sans-Souci, afin que je le brûle ; je ne doute pas que le roi n’y consente.

Je me suis arrêté pour quelques mois dans cette ville, parce qu’il y a quelques avocats[3] qui entendent assez bien le fatras du droit public d’Allemagne, et que j’en avais besoin ; d’ailleurs j’ai un bien assez honnête dans la province d’Alsace.

Je vous prie de permettre que je fasse ici mes compliments à frère Gaillard[4] ; je me flatte qu’il vit du bien de l’Église, et assurément il l’a mérité.

  1. Éditeur, Th. Foisset.
  2. La pièce qui précède.
  3. M. Dupont, entre autres ; voyez la lettre 2643.
  4. L’abbé de Prades.