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qu’on me rendra une entière justice, mais du moins la persécution en serait affaiblie ; elle est extrême. Il ne s’agit plus probablement de Sainte-Palaye, et encore moins de tragédie ; il s’agit d’aller mourir loin des injustices et des persécutions. N’auriez-vous point, mon cher ange, quelque homme sage et discret, à la probité de qui je pusse confier le maniement de mes affaires et l’emballage de mes meubles ? Vous aviez, ce me semble, un clerc de notaire dont vous étiez très-content ; il faudrait que vous eussiez la bonté d’arranger avec lui ses appointements ; je le chargerais de ma correspondance ; mais j’exigerai le plus profond secret. J’attends cette nouvelle preuve de votre généreuse amitié. Je ne peux songer à tout cela sans répandre des larmes.

J’ai écrit à Lambert[1] ; je lui ai recommandé des cartons que je lui ai envoyés pour ces Annales. Je vous prie, quand vous irez à la comédie, d’exiger de lui cette attention. La passion des esprits faibles ferait trop crier les esprits méchants.

Adieu, mon adorable ange ; mille compliments à Mme  d’Argental.


2689. — À M. DE MALESHERBES[2].
À Colmar, 7 février 1754.

Monsieur, je vous prie de pardonner à un malade s’il n’a pas l’honneur de vous écrire de sa main pour vous remercier de vos bontés. J’ai écrit plusieurs fois à ma nièce, qui a dû vous présenter mes très-humbles remerciements, il y a longtemps ; mais j’ai peur que son triste état ne l’ait empêchée de faire auprès de vous tout ce que son cœur et le mien exigeaient.

J’ai reçu, monsieur, une lettre de monsieur l’archevêque de Paris[3], et c’est à vos bons offices que je le dois ; mais cette lettre et celle dont vous m’avez honoré me font voir évidemment que ma nièce n’a pu remplir auprès de vous les soins que son amitié pour moi lui imposait.

Vous m’avez fait l’honneur de me dire par votre lettre que vous ne pouviez rendre témoignage de mon empressement à faire supprimer la malheureuse édition de Jean Néaulme, qui paraît avoir soulevé le clergé de France et déplu beaucoup à Sa Majesté. Il est pourtant très-certain, monsieur, qu’à la première

  1. Imprimeur-libraire à Paris, que quelques personnes croyaient, sans aucune raison, le fils naturel de Voltaire. (B.)
  2. Éditeurs, de Cayrol el François.
  3. Christophe de Beaumont.