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2003. — À M. ALLIOT[1],
conseiller aulique.
Lunéville, le 29 août, à neuf heures du matin.

Je vous prie, monsieur, de vouloir bien avoir la bonté de me faire savoir si je puis compter sur les choses que vous m’avez promises, et s’il n’y a point quelque obstacle.

Le mauvais état de ma santé ne me permet ni de rester longtemps à la cour du roi, auprès de qui je voudrais passer ma vie, ni d’avoir l’honneur de manger aux tables auxquelles il faut se rendre à un temps précis, qui est souvent pour moi le temps des plus violentes douleurs. Il fait froid d’ailleurs, les matins et les soirs, pour les malades.

Il serait un peu extraordinaire que, malgré votre amitié, on refusât ici les choses nécessaires à un homme qui a tout quitté pour venir faire sa cour à Sa Majesté.

Je vous prie de me faire savoir s’il faut en parler au roi.

Voltaire.

2004. — À M. ALLIOT,
conseiller aulique.
Le 29 août, à neuf heures un quart du matin.

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien donner des ordres en vertu desquels je sois traité sur le pied d’un étranger ; et ne me mettez pas dans la nécessité de vous importuner tous les jours.

Je suis venu ici pour faire ma cour au roi. Ni mon travail ni ma santé ne me permettent d’aller piquer des tables. Le roi daigne entrer dans mon état ; je compte passer ici quelques mois.

Sa Majesté sait que le roi de Prusse m’a fait l’honneur de m’écrire quatre lettres pour m’inviter à aller chez lui. Je puis vous assurer qu’à Berlin je ne suis pas obligé à importuner pour avoir du pain, du vin, et de la chandelle. Permettez-moi de vous dire qu’il est de la dignité du roi et de l’honneur de votre admi-

  1. Alliot était commissaire général de la maison du roi Stanislas. Son économie allait un peu loin, car Voltaire dit, dans ses Mémoires, que Mme  de Boufflers « tirait à peine alors du roi de Pologne de quoi avoir des jupes ».