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taisies, quand elle me donne cinq mille écus par an pour ne rien faire.

De plus, je ne connais que le style des personnes que j’ai voulu attirer ici pour travailler, et point leur caractère. Il se pourrait qu’étant employées par Votre Majesté pour un ouvrage qui ne laisse pas d’être délicat et qui demande le secret, elles fissent les difficiles, s’en allassent, et vous compromissent. En me chargeant de tout sous vos ordres, Votre Majesté n’était compromise en rien.

Voilà mes raisons ; si elles ne vous plaisent pas, si Votre Majesté ne se soucie pas de l’ouvrage proposé, me voilà résigné avec la même soumission que je travaillais avec ardeur.

Si Votre Majesté a des ordres à donner, ils seront exécutés. Pourvu que je me console de mes maux par l’étude et par vos bontés, je vivrai et mourrai content.


2437. — DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
1752.

J’ai lu votre premier article[1] qui est très-bon. Vous aurez commencé la table alphabétique des articles ; je crois qu’il faudrait l’achever, avant de commencer l’ouvrage, afin de se fixer à un nombre d’articles, de mieux choisir les principaux, et de ne point permettre d’entrée aux petits détails : car si quelques articles subordonnés aux autres ont l’entrée dans le Dictionnaire, ce sera une nécessité ou de mettre un plus grand détail, ou de changer de projet en travaillant, ce qui ne répondrait pas, il me semble, à l’unité du but qu’il faut se proposer dans un ouvrage de ce genre.


2438. — À MADAME DENIS.
À Potsdam, ce 1er octobre.

Je vous envoie hardiment l’Appel au public, de Kœnig. Vous lirez avec plaisir l’histoire du procédé. Cet ouvrage est parfaitement bien fait ; l’innocence et la raison y sont victorieuses. Paris pensera comme l’Allemagne et la Hollande. Maupertuis est regardé ici comme un tyran absurde ; mais j’ai peur que son abominable conduite n’ait des suites bien funestes.

Il avait agi, dans toute cette affaire, en homme plus consommé dans l’intrigue que dans la géométrie ; il avait secrètement irrité le roi de Prusse contre Kœnig, et s’était adroitement servi

  1. Probablement l’article Abraham, qui fut le premier article du Dictionnaire philosoplique, et dont il est question dans la lettre précédente.