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Votre paquet du 5 janvier m’a été rendu au saint temps de Pâques. Il aurait eu le temps de faire le voyage du Brésil. Je devais, mon cher arpenteur des astres, vous envoyer l’histoire terrestre de Louis XIV ; mais il y a trop de fautes de la part de l’éditeur[1], et de la mienne trop d’omissions, et trop de péchés de commission[2].

Je ne regarde cette esquisse que comme l’assemblage de quelques études dont je pourrai faire un tableau, avec le secours des remarques qu’on m’a envoyées ; et alors, je vous prierai de l’accepter et de me juger. C’est un petit monument que je tâche d’élever à la gloire de ma patrie ; mais il y a quelques pierres mal jointes qui pourraient me tomber sur le nez.

Ce n’est pas dans la lune que j’ai voyagé, avec Astolphe et saint Jean, pour trouver le fruit de mes peines : c’est dans le temple de la philosophie, de la gloire et du repos.

Adieu ; je vous embrasse de tout mon cœur, et je vous aimerai toujours, fussé-je dans la lune.


2361. — À M. G.-C. WALTHER.
À Potsdam, 8 avril 1752.

J’ai ouï dire que Son Altesse royale madame la Princesse royale n’avait pas été contente d’un passage du livre que j’ai pris la liberté de lui envoyer. C’est à la page 484 : On vit bientôt combien il est difficile à un faible prince[3], etc. On sait assez que faible prince ne signifie pas prince faible. Un prince faible est tel par son caractère, et un faible prince l’est par la comparaison de ses forces avec celles de son ennemi.

D’ailleurs, Son Altesse royale est trop juste et trop indulgente pour n’être pas persuadée de la pureté de mes intentions. Elle ne pense pas que j’aie voulu lui déplaire dans un livre que j’ai mis à ses pieds. J’ai la même confiance dans les bontés de Son Excellence M. le comte de Wackerbarth, à qui j’ai présenté un exemplaire par vos mains. Si cependant ce passage déplaît, je vous prie de le corriger au moyen d’un carton. Vous mettriez à la

  1. Joseph du Fresne de Francheville, l’un des élèves du père Porée ; né en 1704, mort on 1781.
  2. Expression de Bayle (Préface de la première édition, treizième alinéa).
  3. Cela se trouvait au chapitre xxiii de l’édition de 1751 du Siècle de Louis XIV.
    Une partie seulement forme le chapitre xxiv actuel. Le passage se lit dans l’édition de Dresde, 1753, autrement qu’il était en 1751, mais autrement aussi que Voltaire le donne plus bas. (B.)