France la permission tacite de prouver que Louis XIV était un grand homme. Franchement, cela est indigne. Il faut donc faire l’Histoire des mœurs du xviiie siècle ? Est-ce qu’il ne se trouvera pas quelque bonne âme qui fera rougir les pédants de la pédanterie, et les sots de leur sottise ? Est-ce qu’il n’y aura pas quelque voix qui criera : Parate vias Domini[1] ? Où est l’intrépide abbé de Chauvelin ? Tu dors, Brutus[2] ! Vous ne me dites rien, mon ange, de ces deux Chauvelin ; ils sont pourtant de l’ancienne république, ils aiment les lettres, ils aiment et disent la vérité, ils sont courageux comme de petits lions. Lâchez-les sur les sots.
Vous m’avez bien consolé, en me disant que Mlle Gaussin n’était plus fâchée contre moi. Dites-lui que cette nouvelle m’a fait plus de plaisir que le cinquième acte n’en a fait au parterre. J’aime tendrement Mlle Gaussin, malgré mes cheveux blancs et la turpitude de mon état.
Adieu, mon cher ange ; je ne croyais pas tant écrire ; je n’en peux plus. Mais qui eût dit que ce gros cochon de milord Tyrconnell, si frais, si fort, si vigoureux, serait à l’agonie avant moi ? C’est bien pis que d’avoir des tracasseries pour son Siècle. Ô vanité ! ô fumée ! Qu’est-ce que la vie ? Madame, morte à vingt-deux[3] ans ! Adieu, mon ange ; portez-vous bien, et aimez-moi, et écrivez-moi.
Mon héros, je suis fort en peine d’un gros paquet que j’eus l’honneur de vous envoyer par le courrier du cabinet, il y a environ deux mois. J’en chargeai Le Bailli, mon camarade, gentilhomme ordinaire du roi, qui a fait depuis six mois les affaires, pendant la maladie de milord Tyrconnell. Le ballot pesait environ dix livres, et contenait les volumes[4] que vous m’aviez demandés. Il y avait une grande lettre pour vous, et un paquet pour ma nièce, que je vous suppliais d’ordonner qu’il lui fût rendu. Pardon de la liberté grande[5]. Vous êtes informé sans doute, monseigneur, de la mort du comte de Tyrconnell. Il était