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près cinq cents pages, ou quatre cent quatre-vingts, ou approchant : c’est de quoi je serai plus parfaitement instruit quand la table des matières sera achevée. On peut vendre les deux mille quatre cents exemplaires deux rixdalers, ou au moins deux florins chacun. Je ne veux pas assurément y gagner, mais je ne veux pas y perdre. L’ouvrage m’a coûté, avec le secrétaire et M. de Francheville qu’il a fallu payer, environ deux mille écus, parce qu’il y a des feuilles que j’ai refaites trois fois. Je vous donnerai volontiers la préférence sur d’autres libraires qui m’en offrent davantage ; et encore je ne vous demanderai ces deux mille écus qu’au 1er juillet, et vous donnerez un présent de cinquante écus à M. de Francheville. Si je vous abandonnais seulement cinq cents exemplaires, vous ne pourriez avoir ni le privilège, ni le droit de traduction, parce qu’il faudrait nécessairement donner ces droits à ceux qui prendaient la plus grosse partie ; mais si vous vous chargiez du total, alors le même homme[1] qui a traduit les tragédies de Phèdre et d’Alzire, en allemand, avec beaucoup de succès, traduirait pour vous le Siècle de Louis XIV, et il ne vous en coûterait rien, et vous pourriez ensuite joindre cet ouvrage à mes Œuvres. Je me déterminerai suivant votre réponse. Il se présente une plus grande entreprise : c’est d’imprimer et de débiter volume à volume les auteurs classiques de France, avec des notes très-instructives sur la langue, sur le goût, et quantité d’anecdotes au bas des pages ; on commencerait par La Fontaine, Corneille, Molière, Bossuet, Fléchier, etc. Rien ne serait plus utile pour donner aux étrangers l’intelligence parfaite du français, et pour former le goût. J’ose dire qu’une telle entreprise fera la fortune de celui qui en fera les frais. Nous commencerions à la Saint-Jean, et cela irait sans interruption. Vous pouvez voir que je ne songe qu’à vous rendre service. C’est à vous à voir si vous voulez joindre votre peine à mes soins. Je vous embrasse.


Voltaire.

2313. — À FREDERIC II, ROI DE PRUSSE.

Sire, comme vos ouvrages sont plus tentants que les miens, il pourra bien quelque jour arriver à Votre Majesté ce qui m’arrive. À mesure qu’on imprimait, chez Henning[2] les feuilles du

  1. M, de Stieven.
  2. Voyez la lettre 2276.