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trouvées ; et, pour les agréables, j’espère que le bon goût n’y admettra point d’algèbre.

Je ne vous enverrai plus ni prose ni vers. Je vous compte ici au commencement de juillet, et j’ai tout un fatras poétique dont vous pourrez faire la dissection : cela vaut mieux que de critiquer Crébillon ou quelque autre, où certainement vous ne trouverez ni des fautes aussi grossières ni en aussi grand nombre que dans mes ouvrages.

Il n’y a que des chardons à cueillir sur les bords de la Neva, et point de lauriers. Ne vous imaginez point que j’aille là pour faire mon bonheur ; vous me trouverez ici, pacifique citoyen de Sans-Souci, menant la vie d’un particulier philosophe.

Si vous aimez à présent le bruit et l’éclat, je vous conseille de ne point venir ici ; mais si une vie douce et unie ne vous déplaît pas, venez, et remplissez vos promesses. Mandez-moi précisément le jour que vous partirez, et, si la marquise du Châtelet est une usurière, je compte de m’arranger avec elle pour vous emprunter à gages, et pour lui payer par jour quelque intérêt qu’il lui plaira pour son poëte, son bel esprit, son…, etc.

Adieu ; j’attends votre réponse.

Fédéric.

1974. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL[1].
Mai.

Je demande les plus humbles pardons à mes anges ; mais avant qu’on ait remercié le roi[2], les ministres, les commis, serré la main aux valets de chambre, dit des douceurs au suisse, apaisé ses camarades, stipulé avec le sieur Dufour, pris en payement des billets, remis encore par bonté imbécile une petite partie de la somme, etc., etc., il se passe bien du temps, et on peut revenir souper le mardi à Paris. Cependant, pour vous faire amende honorable, je vais repolir encore un ouvrage que vous aimez[3], et qui, sans vous, n’aurait jamais mérité d’être aimé du public. Je travaille ici pour vous plaire, et c’est ma consolation en me privant du plaisir de vous faire ma cour,


1975. — DE MADAME LA PRINCESSE D’ANHALT-ZERBST[4].
À Zerbst, ce 25 mai.

Monsieur, je suis trop sensible à la manière obligeante dont vous avez bien voulu vous prêter à la commission hardie dont j’avais osé charger

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Le 27 mai, Voltaire avait été autorisé à vendre sa charge de gentilhomme ordinaire, tout en en conservant le titre.
  3. Nanine.
  4. Jeanne-Elisabeth de Holstein, née le 24 octobre 1712, et mariée, vers la fin