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souhaitons. Le margrave vous fait bien des amitiés. Saluez tous les frères qui se souviennent encore de moi, et soyez persuadé que l’abbesse de Baireuth ne désire rien tant que de pouvoir convaincre frère Voltaire de sa parfaite estime.

Wilhelmine.

2179. — À M. DARGET.
Ce 25 janvier 1751.

Je vous prie, mon cher ami, de me mander si le roi veut bien avoir la bonté de me laisser rétablir ma santé dans cette maison de campagne auprès de Potsdam. J’ai absolument tout ce qu’il me faut, et je partirai sans délai. J’ai bien envie de deux choses, de vous et de la solitude.

Dites-moi, ou faites-moi dire par M. Fredersdorf, si je peux compter sur cette permission du roi.


2180. — À MADAME LA MARGRAVE DE BAIREUTH[1].
janvier 1751.

Madame, Votre Altesse royale a plus de rivaux qu’elle ne pense, mais je crois que le marquis d’Adhémar vous donnera la préférence. Je lui écris encore fortement. Tout mon désir est de pouvoir être à vos pieds au printemps. Mais quel est l’homme qui soit le maître de sa destinée ? Frère Voltaire est ici en pénitence, il a eu un chien de procès avec un juif[2], et selon la loi de l’Ancien Testament il lui en coûtera encore pour avoir été volé, et, par-dessus le marché, il en résulte une belle tracasserie, laquelle, subdivisée en quatre ou cinq petites, pourrait former un sujet de comédie aussi plaisant que le manifeste de la czarine, qui prend l’Europe à témoin que M. Gross[3] n’a pas été prié à souper. Cela amuserait Votre Altesse royale sur votre théâtre de Baireuth. Monseigneur le prince Henri joua hier Sidney pour la clôture du carnaval. Il me semble que c’est mettre un habit de deuil un jour de gala. Voilà un étrange sujet de

  1. Revue française, 1er février 1866 ; tome III, page 210.
  2. Abraham Hirschell.
  3. Ministre de Russie à Berlin. L’impératrice Elisabeth, qui préparait alors l’alliance austro-russe, lui avait donné mission d’amener à tout prix une rupture entre les cours de Saint-Pétersbourg et de Berlin. Gross ne trouva rien de mieux, lors d’une fête à laquelle le corps diplomatique fut invité à souper, que de quitter les appartements du roi un quart d’heure avant l’arrivée du courrier royal porteur de l’invitation qui lui était adressée.