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Et le palais d’azur et d’or
Reçoit le tribut des chaumières.

Voici donc, sire, un três-chétif tribut qui n’est pas dans le goût du comique larmoyant, car il faut bien se tourner de tous les sens pour vous plaire.

Comme j’allais continuer cette petite épître, j’en reçois une de Votre Majesté. Celle-là prouve bien mieux encore l’immensité des richesses de votre génie. Ni vous ni personne n’a jamais rien fait de si bien, ou du moins de mieux que ces vers :


Des grandeurs et des petitesses[1],
Quelques vertus, plus de faiblesses, etc.

Je sens, à la lecture de cette lettre, que, si j’avais un peu de santé, je partirais sur-le-champ, fussiez-vous à Königsberg. Vous daignez demander Oreste ; je vais le faire transcrire ; mais que Votre Majesté ne s’attende pas à voir un Palamède ; il n’y en a point dans Sophocle.

À l’égard du prétendu Testament politique du cardinal de Richelieu, je réponds bien que Mme  d’Aiguillon n’en aura jamais l’original. Sire, on n’a jamais vu l’original de tous ces testaments-là. Indépendamment des misères dont ce livre est plein, je trouve qu’Armand est bien petit devant Frédéric.


· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Ceux dont l’imprudence
Dans d’indignes mortels a mis sa confiance[2].

L’imprudence met sa confiance. L’imprudence ne mettent pas. Mais l’imprudence pourrait, à toute force, mettre leur confiance, en rapportant ce leur au dont. Ce serait une licence qui, en certains cas, serait permise.

Mon chancelier d’Olivet dirait le reste. Mais, quand j’écris au plus grand homme de notre siècle, je ne connais que le sentiment de l’admiration, L’enthousiasme fait oublier la grammaire. À vos genoux.

  1. Voyez page 101.
  2. Dans l’Épître à Podewils, par Frédéric, on lit, vers 101-102 :
    Plongés dans l’indolence,
    En d’indignes mortels ont mis leur confiance.