J’ai passé plusieurs fois chez vous[2] pour vous remercier d’avoir donné au public des pensées[3] au-dessus de lui. Le siècle qui a produit les Étrennes de la Saint-Jean[4], les Écosseuses[5], Misapouf[6], ne vous méritait pas ; mais enfin il vous possède, et je bénis la nature. Il y a un an que je dis que vous êtes un grand homme, et vous avez révélé mon secret. Je n’ai lu encore que les deux tiers de votre livre ; je vais dévorer la troisième partie. Je l’ai porté aux antipodes, dont je reviendrai incessamment pour embrasser l’auteur, pour lui dire combien je l’aime, et avec quels transports je m’unis à la grandeur de son âme et à la sublimité de ses réflexions, comme à l’humanité de son caractère. Il y a des choses qui ont affligé ma philosophie ; ne peut-on pas adorer l’Être suprême sans se faire capucin[7] ? N’importe, tout le reste
- ↑ Vauvenargues ayant donné son livre en février 1746, cette lettre a dû suivre de près.
- ↑ Vauvenargues avait quitté Aix, et demeurait alors à Paris, rue du Paon, faubourg Saint-Germain, hôtel de Tours. (Cl.)
- ↑ Allusion au volume in-12 paru en janvier sous le titre d’Introduction à la connaissance de l’esprit humain, suivie de Réflexions et de Maximes.
- ↑ Recueil de divers auteurs, entre autres Montesquieu, le comte de Maurepas, le comte de Caylus, et La Chaussée. C’est un volume in-12 dont la première édition est de 1742.
- ↑ C’est le titre d’un volume in-12 publié en 1739, et dont on dit que les auteurs sont Vadé, le comte de Caylus, et la comtesse de Verrue.
- ↑ Le Sultan Misapouf et la Princesse Grisemine, par Voisenon, 1746, deux parties in-12.
- ↑ Voltaire fait ici allusion, non pas à quelques maximes qui ont également affligé sa philosophie ; mais à la Méditation sur la foi, car il dit précédemment
Votre Excellence à Naples, et goûter le ravissement de la voir élevée à l’honneur qu’elle ambitionne. Je me flatte que tout ce qu’elle désire sera de Votre Excellence obtenu sans faute, puisque M. le prince d’Ardore ayant été décoré de l’ordre du roi de France, il est bien juste que le roi de Naples accorde quelques faveurs à la plus aimable des dames françaises qui puissent faire l’ornement d’une cour. Je prévois donc l’accomplissement de tous ses vœux. Mais je ne me consolerai jamais de ne pas voir de mes propres yeux son bonheur, de ne pouvoir embrasser son fils ni saluer profondément sa chère mère. Ici ce sont des fêtes chaque jour. Nos communes victoires en Italie et en Flandre ont porté la maison de Bourbon au comble de la gloire. Le duc de Richelieu doit être à présent débarqué en Angleterre, et peut-être aura-t-il chassé le roi Georges quand Votre Excellence recevra ma lettre. Que ma très excellente dame soit toujours aussi heureuse que le sont nos monarques. J’augure un très-favorable résultat de l’affaire dans laquelle la tres-affectionnée mère de Votre Excellence et ses très-dévoués serviteurs sont activement engagés ; et je reste toujours avec la vive ambition de lui obéir, et avec la plus sincère vénération, de Votre Excellence, etc.