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Il faut le louer, et me taire ;
Mais plût à Dieu, grand roi, que vous fussiez le mien !

M. de Fénelon vint avant-hier chez moi pour me questionner sur votre personne : je lui répondis que vous aimez la France, et ne le craignez point ; que vous aimez la paix, et que vous êtes plus capable que personne de faire la guerre ; que vous travaillez à faire fleurir les arts à l’ombre des lois ; que vous faites tout par vous-même, et que vous écoutez un bon conseil. Il parla ensuite de l’évêque de Liège, et sembla l’excuser un peu ; mais l’évêque n’en a pas moins tort, et il en a deux mille démonstrations[1] à Maeseyk. Je suis, etc.


1348. — À M. THIERIOT[2].
À la Haye, ce 29 septembre.

Je n’ai que le temps, après avoir un peu couru, de vous dire, mon cher ami, qu’il ne m’a manqué que vous, quand j’ai eu le bonheur de voir le roi de Prusse. Je voudrais avoir été plus utile à M. Dumolard ; mais M. Jordan, à qui j’ai écrit une longue lettre sur son compte, et à qui vous avez écrit aussi, m’est témoin, aussi bien que M. de Maupertuis, combien j’ai sollicité en sa faveur. Je ne suis point

Dissimulator opis proprice, mihi commodus uni.

J’ai fait ce que j’ai pu, mais le roi a déjà beaucoup de bibliothécaires et beaucoup de gens savants dans les langues. Il me semble que M. Dumolard m’a dit qu’il pourrait être utile dans une imprimerie. Le roi a dessein d’en établir une très-belle ; si donc M. Dumolard pouvait en être le directeur, ce serait un commencement de fortune pour lui. Il faudrait, en ce cas, que je susse s’il pourrait établir des fonderies de caractères à meilleur marché que des Anglais et des Hollandais, qu’on propose au roi, et s’il voudrait se consacrer pour quelque temps à ce travail. Je voudrais de tout mon cœur lui rendre service, et le cœur me

  1. Allusion aux deux mille hommes que Frédéric fit entrer dans Maeseyk, le 14 septembre 1740, pour soutenir ce qu’il appelait ses droits sur la baronnie d’Herstall. Voltaire composa, à cette occasion, un manifeste. Ainsi le premier des exploits du grand Frédéric fut une victoire remportée contre un évêque. (Cl.) — Voyez le Sommaire des droits de S. M. le roi de Prusse sur Herstall, tome XXIII, page 153.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.