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le plan de Wesel avant d’observer le roi, qui n’y sera que le 26. Il n’observera jamais en sa vie d’astre si bienfaisant.

L’archiduchesse qui gouverne Bruxelles est, dit-on, un astre à son couchant : sa santé baisse beaucoup et donne des alarmes. Elle est aimée ici, parce qu’elle n’a jamais fait de mal. Je vous embrasse.


1336. — À M. LE MARQUIS D’ARGENS[1].
À la Haye,.. août.

Votre livre de philosophie[2] a achevé de vous donner mon cœur. Je vous prie de me regarder comme votre partisan, votre admirateur et votre ami. La générosité avec laquelle vous aimez la vérité doit vous rendre cher à tous ceux qui aiment cette vérité si défigurée, si persécutée dans le monde. Adieu, monsieur ; continuez d’être philosophe comme Épicure.


1337. — À M. DE MAUPERTUIS.
À Bruxelles, le 29 d’août ; la troisième année
depuis la terre aplatie.

Comment diable vouliez-vous, mon grand philosophe, que je vous écrivisse à Wesel ? Je vous en croyais parti pour aller trouver le roi des sages sur sa route. J’ai appris qu’on était si charmé de vous avoir dans ce bouge fortifié que vous devez vous y plaire : car qui donne du plaisir en a.

Vous avez déjà vu l’ambassadeur rebondi du plus aimable monarque du monde. M. de Camas est sans doute avec vous. Pour moi, je crois que c’est après vous qu’il court. Mais vraiment, à l’heure que je vous parle, vous êtes auprès du roi. Le philosophe et le prince s’aperçoivent déjà qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Vous direz avec M. Algarotti : Faciamus hic tria tabernacula[3] ; pour moi, je ne puis faire que duo tabernacula.

Sans doute je serais avec vous si je n’étais pas à Bruxelles, mais mon cœur n’en est pas moins à vous, et n’en est pas moins le sujet du roi qui est fait pour régner sur tout être pensant et sentant. Je ne désespère pas que Mme du Châtelet ne se trouve quelque part sur votre chemin : ce sera une aventure de conte de

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. La Philosophie du bon sens.
  3. Saint Matthieu, xvii, 4.