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nople ; for it looks upon the river, and a long tract of land, interspers’d with pretty houses, is to be seen from every window. Upon my word, I would, with all that, prefer the vista of the sea of Marmara before that of the Seine, and I would pass some months with you at Constantinople, if I could live without that lady, whom I look upon as a great man, and as a most solid and respectable friend. She understands Newton ; she despises superstition, and in short, she makes me happy.

I have received, this week, two summons from a french man who intends to travel to Constantinople. He would fain intice me tho that pleasant journey. But since you could not, nobody can.

Farewell, my dear friend, whom I will love and honour all my life time, farewell. Tell me how you fare ; tell me you are happy ; I am so, if yo continue to be so. Yours for ever[1] !

  1. Traduction : Mon cher monsieur, je prends la liberté de vous envoyer mes vieilles folies, n’en ayant pas de nouvelles à vous offrir. Je suis en ce moment à Bruxelles avec la même Mme du Châtelet, qui m’a empêché, il y a quelques années, de vous rendre visite à Constantinople, et avec laquelle il est probable que je passerai la plus grande partie de ma vie, car depuis dix ans je ne l’ai pas quittée. Elle est maintenant dans les embarras d’un maudit procès qu’elle poursuit à Bruxelles. Nous avons quitté la plus agréable retraite à la campagne, pour venir criailler ici dans l’antre de la chicane flamande.

    Le haut baron hollandais qui se charge de vous transmettre ce paquet de

    rêveries françaises est un de ces nobles acteurs que l’empereur envoie en Turquie pour représenter la majesté de l’empire romain devant Sa Hautesse la puissance musulmane.

    Je suis persuadé que vous êtes devenu, à cette heure, un véritable Turc ; vous

    parlez sans doute la langue à merveille ; vous avez, j’en suis sûr, un joli harem. Cependant je crains qu’il ne vous manque deux provisions ou deux objets qui me semblent indispensables pour faire passer l’amère boisson de la vie, je veux dire des livres et des amis. Seriez-vous assez heureux pour avoir rencontré à Péra des hommes dont la conversation s’accorde avec votre manière de penser ? S’il en est ainsi, il ne vous manque rien, car vous avez de la santé, des honneurs et de la fortune. Moi je n’ai ni santé ni place ; je regrette le premier de ces biens, je me passe volontiers de l’autre. Quant à la fortune, celle que j’ai me suffit, et j’ai de plus un ami. Je me trouve donc heureux, quoique tout aussi souffrant que vous m’avez vu à Wandsworth.

    J’espère retourner à Paris avec Mme du Châtelet dans deux ans. Si vers cette époque vous revenez dans votre chère Angleterre par la route de Paris, j’espère avoir le plaisir de voir Votre chère Excellence à l’hôtel de madame la marquise, qui est sans contredit un des plus beaux de Paris et situé dans une position digne de Constantinople, car il a vue sur la rivière, et de toutes les fenêtres on découvre une vaste étendue parsemée de jolies maisons. Sur ma parole, je préférerais malgré tout cela la vue de la mer de Marmara à celle de la Seine, et je passerais quelques mois avec vous à Constantinople, si je pouvais vivre sans cette dame, que je regarde comme un grand homme, comme le plus solide et le plus respectable ami. Elle comprend Newton ; elle méprise la superstition ; en un mot, elle me rend heu-