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pour toute astronomie le livre de Bion[1], qui n’est qu’un ramas informe de quelques mémoires de l’Académie. On est obligé, quand on veut s’instruire de ces sciences, de recourir aux étrangers, à Keill, à Wolff, à S’Gravesande. On va imprimer enfin des Institutions physiques[2], dont M. Pitot est l’examinateur, et dont il dit beaucoup de bien. Je n’ai eu que le mérite d’être le premier qui ait osé bégayer la vérité ; mais, avant qu’il soit dix ans, vous verrez une révolution dans la physique, et se mirabitur Gallia neutonianam.

Et nous dirons avec vos Gèorgiques :

Miraturque novas frondes et non sua poma.

(Lib. II, v. 82.)

Il est vrai que la physique d’aujourd’hui est un peu contraire aux fables des Gèorgiques, à la renaissance des abeilles, aux influences de la lune, etc. ; mais vous saurez, en maître de l’art, conserver les beautés de ces fictions, et sauver l’absurde de la physique.

Voilà à quoi vous servira l’esprit philosophique, qui est aujourd’hui le maître de tous les arts.

Si vous avez quelque objection à faire sur Newton, quelque instruction à donner sur la littérature, ou quelque ouvrage à communiquer, songez, monsieur, je vous en prie, à un solitaire plein d’estime pour vous, et qui cherchera toute sa vie à être digne de votre commerce. C’est dans ces sentiments que je serai, etc.


952. — À M. L’ABBÉ DUBOS[3].
À Cirey, le 30 octobre.

Il y a déjà longtemps, monsieur, que je vous suis attaché par la plus forte estime ; je vais l’être par la reconnaissance. Je ne vous répéterai point ici que vos livres doivent être le bréviaire des gens de lettres, que vous êtes l’écrivain le plus utile et le plus judicieux que je connaisse ; je suis si charmé de voir que vous êtes le plus obligeant que je suis tout occupé de cette dernière idée.

  1. Nicolas Bien, mort à Paris en 1733.
  2. Voyez tome XXIII, page 129.
  3. Sur l’abbé Dubos, voyez tome XIV, page 66. cette lettre fut imprimée en 1739, in-12 de 6 pages, mais défigurée par de grossières fautes ; ce n’est pas sans raison que Voltaire s’en plaint dans sa lettre à Berger classée après le 28 avril 1739.