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que vous pourrez savoir aisément par d’autres), en ce cas je vous prie de lui compter cinq cents livres, dont il vous donnera son reçu : J’ai reçu de M. de Voltaire, par les mains de M…, la somme de cinq cents livres, pour fournitures à lui faites, en attendant que le mémoire que j’ai remis à M. Moussinot soit arrêté.

Vous aurez la bonté d’exiger de lui qu’il vous rende généralement toutes les lettres et papiers qu’il pourrait avoir à moi, aucune n’étant créance.

4° Il est très-certain que je vais travailler à retirer les trois caisses de Bruxelles, mais il est aussi très-certain que c’est de tout point une malheureuse affaire. Collens est pauvre, dérangé, voluptueux et inappliqué ; vous ne reverrez jamais un sou de tout ce qui lui a passé par les mains. Il faut absolument finir avec lui ; mais il n’y a que vous au monde qui le puissiez : il faut lui donner un rendez-vous, le chercher, le trouver, ne le point quitter que vous n’ayez signé avec lui un compromis. Il reste ici pour environ dix-huit cents florins de tableaux sur le pied de l’achat ; il en a emporté environ autant. Il faut donc proposer qu’il vous abandonne en entier la perte et le gain de ces trois caisses. Cela est d’autant plus juste qu’en ce cas, si nous payons encore pour la taxe mille florins, notre part nous reviendra à deux mille huit cents florins : il vous devrait même une indemnité.

Il y a une seconde proposition à lui faire, c’est qu’il vous compte à Paris dix-huit cents florins, et qu’il prenne le tout pour lui. Nous y perdrons ; mais il vaut mieux s’en tirer ainsi que de s’embourber davantage. Ne le quittez pas qu’il n’ait pris un de ces partis, car je prévois depuis longtemps un procès : il voudra me faire payer sa fausse déclaration. En vain il a avoué devant un avocat de Bruxelles que c’était sa faute, en vain l’a-t-il avoué devant M. du Châtelet ; je sais qu’on l’excite à me poursuivre : ainsi il se trouverait que j’aurais prêté plus de dix-huit cents florins, et que j’aurais un procès au bout. C’est la circonstance où je suis avec lui qui me met entièrement hors d’état de lui rien proposer.

C’est à vous, mon cher abbé, à consommer cette affaire ; je vous en prie très-instamment. Eh bien ! j’aurai perdu les frais de votre voyage ; le mal est médiocre, et le plaisir de vous voir ne peut être trop payé. D’ailleurs il y a des occasions où il faut savoir perdre.

Je vous embrasse du meilleur de mon âme.