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1208. — DU BARON DE KEYSERLINGK.

Quoique rien ne saurait être ajouté aux sentiments de tendresse et à mon parfait attachement pour vous, monsieur, il est pourtant hors de doute que, s’il avait plu à mon auguste maître de vous les dépeindre, vous en auriez été convaincu d’une manière bien plus agréable. Je suis en savoir comme une jeune beauté passée qui doit la plupart de ses charmes à ses ajustements. Déshabillée, vous déplairait-elle ? Je pense que non, et j’ose hardiment vous faire voir toute nue l’amitié avec laquelle je serai toute ma vie, monsieur, tout à vous, et votre, etc.,

de Keyserlingk.

Faites agréer, je vous en supplie, mes assurances de respect a madame la marquise. Je serais au comble de mes souhaits si, à la suite de mon adorable maître, je pouvais me transporter à Paris[1] pendant que Mme du Châtelet, M. le prince de Nassau, et vous, monsieur, contribuez à en embellir le séjour. Mais, monsieur, jugez-moi, s’il vous plaît, par vous-même : seriez-vous disposé à quitter madame la marquise pour venir nous trouver à Remusberg ?


1209. — À M. DE CIDEVILLE,
chez m. l’abbé bignon, ou au chateau de tournebu
route de rouen.
À Paris, le 11 octobre.

Mon cher ami, je tombai malade le jour même que je devais partir avec M. le duc de Richelieu, et me voici entre MM. Silva et Morand. On ne disait pas trop de bien d’abord de mon cul et de ma vessie ; mais, Dieu merci, ces deux parties misérables ne sont pas offensées. On me saigne, on me baigne. Si vous êtes encore dans le voisinage de Paris, et dans le dessein d’y faire un tour, votre ancien ami gît rue Cloche-Perce, à l’hôtel de Bri et Émilie plane à l’hôtel Richelieu.

Je vous embrasse mille fois.

RÉPONSE DE CIDEVILLE AU BAS DE LA LETTRE.
Le 12.

Oui, j’irai, cher ami, dans peu,
Mais tard au gré de mon envie,
Adorer Émilie
À cet hôtel de Richelieu,
Vous baiser à celui de Brie,
Sans m’enivrer du vin du lieu.

  1. Keyserlingk devait faire ce voyage, qui n’eut pas lieu.