Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome35.djvu/301

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans un autre. Je devrais remarquer d’abord qu’il est question, dès le commencement, d’une paix générale qui n’a jamais été faite, et que le cardinal n’avait nulle envie ni nul intérêt de faire. C’est une preuve assez forte, à mon sens, que tout cela fut écrit par un homme savant et oisif, qui comptait qu’on allait faire la paix. Songeons encore que ce Testament, autant qu’il m’en souvient, commence par faire ressouvenir le roi que le cardinal, en entrant au conseil, promit à Louis XIII d’abaisser les grands, les huguenots, et la maison d’Autriche. Je soutiens, moi, qu’un tel projet, en entrant au conseil, est d’un fanfaron peu fait pour l’exécuter ; et j’ajoute qu’en 1624, quand Richelieu entra au conseil par la faveur de la reine mère, il était fort loin encore d’être premier ministre.

Je me suis un peu étendu sur cet article ; le temps qui presse m’empêche de suivre en détail votre ouvrage d’Aristide ; Mme du Châtelet le lit à présent. Nous vous en parlerons plus au long, si vous le permettez ; mais tout se réduira à regarder l’auteur comme un excellent serviteur du roi, et comme l’ami de tous les citoyens.

Comment avez-vous eu le courage, vous qui êtes d’une aussi ancienne maison que M. de Boulainvilliers, de vous déclarer si généreusement contre lui et contre ses fiefs ? J’en reviens toujours là ; vous vous êtes dépouillé du préjugé le plus cher aux hommes en faveur du public.

Nous résistons à l’envie la plus forte de faire une copie de ce bel ouvrage ; nous sommes aussi honnêtes gens que vous, dignes de votre confiance, et nous ne ferons pas transcrire un mot sans votre permission. Nous vous demanderions celle d’envoyer l’ouvrage au prince royal de Prusse, si vous étiez disposé à l’accorder. Faire connaître cet ouvrage au prince, ce serait lui rendre un très-grand service. Je m’imagine que je contribuerais par là au bonheur de tout un peuple.

On m’annonce une nouvelle qui ne contribuera pas à mon bonheur particulier. On m’écrit que l’abbé Desfontaines a eu la permission de désavouer son désaveu même ; qu’il a assuré, dans une de ses feuilles, que ce prétendu désaveu était une pièce supposée. Cette nouvelle, qui me vient de la Hollande, m’a l’air d’être très-fausse[1] ; du moins je le souhaite.

Comment Desfontaines aurait-il eu l’insolence de nier un désaveu minuté de votre main, écrit et signé de la sienne, et

  1. Cette nouvelle était fausse en effet.