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avec le roi de Prusse, et pour souper avec le prince royal, je vous prie de me recommander à lui auprès de cet aimable prince ; et moi, je me vanterai auprès de Son Altesse royale de devoir les bontés de M. de Valori à celles dont vous m’honorez. Ainsi toute justice sera accomplie.

Il y a près d’un an que j’ai dit en vers au prince royal[1] ce que vous me dites en prose, et que je lui ai cité la reine Jacques[2] (regina Jacobus), qui dédiait ses ouvrages à l’enfant Jésus, et qui n’osait secourir le Palatin, son gendre. Mon prince me paraît d’une autre espèce ; il ne tremble point à la vue d’une épée, comme Jacques, et il pense comme il le doit sur la théologie. Il est capable d’imiter Trajan dans ses conquêtes, comme il l’imite dans ses vertus. Si j’étais plus jeune, je lui conseillerais de songer à l’empire, et à le rendre au moins alternatif entre les protestants et les catholiques. Il se trouvera, à la mort de son père, le plus riche monarque de la chrétienté en argent comptant ; mais je suis trop vieux, ou trop raisonnable, pour lui conseiller de mettre son argent à autre chose qu’à rendre ses sujets et lui les plus heureux qu’il pourra, et à faire fleurir les arts. C’est, ce me semble, sa façon de penser. Il me paraît qu’il n’a point l’ambition d’être le roi le plus puissant, mais le plus humain et le plus aimé.

Adieu, monsieur ; quand vous voudrez quelques amusements en prose ou en vers, j’ai un gros portefeuille à votre service. Je voudrais vous témoigner autrement ma respectueuse reconnaissance ; mais parvi, parva damus.

À jamais à vous ex toto corde meo[3] etc.


1153. — À M. LE PRÉSIDENT BOUHIER.
Cirer, pridie nonas (6 mai).

Tibi gratias ago quam plurimas, vir doctissime et optime, de tuo quem mihi promittis Petronio[4]. Jam in te miratus sum, priscorum, qui litteras restituerunt et bonas artes, senatorum Budæorum et Thuanorum elegantem et peritissimum æmulatorem, scientiæ pene oblitæ restitutorem, et ætatis tuæ ornamentum.

  1. C’est dans l’épître Sur l’usage de la science dans les princes, année 1736.
  2. Jacques Ier, roi d’Angleterre.
  3. Deutéronome, vi, 5.
  4. Poëme de Pétrone sur la guerre civile avec deux épîtres d’Ovide, le tout traduit en vers français ; Paris, 1738, in-12. Une première édition avait paru à Londres, 1737, in-4o. (B.)